UNION

LES ENSEIGNEMENTS DES MAITRES DE LA HIERARCHIE

LE MONDE DE DEMAIN Par Annie BESANT - 1909

L'ÉPANOUISSEMENT DE LA CONSCIENCE ET SA VALEUR

L'ÉPANOUISSEMENT DE LA CONSCIENCE ET SA VALEUR


Au cours des conférences, que celle de ce soir terminera, j'ai parlé de l'existence, dans l'homme, d'une conscience plus haute que celle que nous connaissons actuellement sous le nom de conscience physique à l'état de veille. J'y ai fait allusion maintes et maintes fois, ne m'y arrêtant que quelques instants, ne pouvant interrompre le sujet que je traitais pour vous donner une description détaillée de l'épanouissement de cette conscience et de ses instruments : c'est-à-dire du corps ou plutôt des corps de l'homme.
Tout ce dont je vous ai parlé jusqu'à présent me paraitrait tant soit peu imparfait, si, avant de quitter les sujets traités ici, je n'essayais de vous soumettre quelques données sur l'épanouissement de cette conscience supérieure dans l'homme, conscience qui existe dans chacun de nous, fonctionnant d'une façon [256] intermittente, et qui est aujourd'hui en cours de développement dans l'humanité.
Simultanément avec le développement de la conscience se poursuit une évolution continuelle des corps à l'aide desquels cette conscience peut s'exprimer. C'est là le sujet que je vais aborder ce soir en essayant de vous exposer, aussi clairement que possible, la théorie étudiée par les théosophes relativement à cette question. Quelques-uns d'entre nous ont pu vérifier cette théorie par des investigations personnelles ; de plus, chose beaucoup plus importante, – elle est confirmée par les grandes Écritures des religions du monde, par les témoignages de voyants et de prophètes de l'ordre le plus élevé et le plus inspiré.
Nous sommes malheureusement trop souvent portés à accorder plus de crédit à l'évidence contemporaine qu'à celle qui nous vient des grandes Écritures du monde. Pour moi, cela équivaut à placer un écran devant ses yeux pour ne pas voir la lumière du soleil. Il est certain, si l'on veut bien y réfléchir, que les témoignages donnés présentement par des étudiants à demi développés ne peuvent avoir, de par la nature même des choses, une valeur aussi grande que celle des témoignages de [257] grands prophètes et voyants de l'humanité, témoignages contenus, bien que sous une forme mystique et allégorique, dans les grandes Bibles de l'humanité.
En fait, les attestations de l'investigateur moderne devraient être plutôt vérifiées et régies par ces révélations bien plus complètes et plus importantes. C'est toujours un sujet de satisfaction pour le voyant moderne, en partie développé, quand il peut constater que ses propres investigations peuvent jeter quelque lumière sur les enseignements donnés par les Écritures et les Bibles de l'humanité.
Je ne prétends donc nullement vous présenter rien qui soit comparable, en valeur, à ce que vous pouvez trouver vous-mêmes dans les grandes Bibles des religions si vous êtes spirituellement illuminés. Je crois seulement que les investigations actuelles peuvent nous aider à comprendre ces importantes révélations, nécessairement obscures pour nous par suite de l'immense différence de savoir entre ceux dont elles émanent et ceux qui les étudient. Aussi, quelque modeste que soit notre connaissance actuelle, elle peut cependant être suffisante pour déchiffrer ces fameux manuscrits du passé, pour nous aider à pénétrer plus [258] profondément le sens de ces vérités qui nous ont été léguées par l'antiquité et les Sauveurs du monde.


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Tout d'abord, je crois devoir entrer dans quelques détails et définitions préliminaires qui pourront rendre plus accessible ce que j'ai à vous dire sur ce sujet. Si vous voulez étudier la constitution du corps humain, comparativement simple, vous devez d'abord vous rendre compte de la différence qui existe entre un os et un nerf, une artère et une veine, et comprendre la signification de tous les termes, plus ou moins familiers, et employés par le physiologiste, pour expliquer l'anatomie et la physiologie du corps. On ne peut avoir d'idées claires et définies sur un sujet qu'en étudiant la simple nomenclature de ce que l'on désire comprendre ; s'il est possible d'éviter les mots d'une autre langue, il est par contre impossible de ne pas demander un certain effort d'esprit à l'étudiant qui désire être autre chose qu'un simple auditeur superficiel ne possédant aucune notion des sujets qu'il prétend approfondir. [259]


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CONSTITUTION DE L'HOMME


Une des épitres de saint Paul donne de la Constitution de l'homme une très bonne et très simple description sous la forme d'une division triple, division parfaitement exacte qui, cependant, doit comporter des subdivisions. Mais pour l'instant, cette triple division, à laquelle nous ajouterons certaines subdivisions, sera suffisante pour vous donner une idée claire et définie de la conscience dans l'homme. Par votre propre expérience, vous pourrez juger ensuite dans quelle proportion votre conscience a pu s'épanouir et si les véhicules propres à l'expression de cette conscience, plus grande, n'ont pas été suffisamment développés pour lui permettre de se manifester dans les mondes en connexion avec le monde physique. Cette division de l'homme, que bien certainement vous connaissez tous, est la suivante :
L'Esprit ;
L'Âme ;
Le Corps.


Je suis vraiment étonnée de constater combien la plupart des chrétiens sont ignorants sur le vrai sens des deux premiers termes : "Esprit [260] et Âme", qu'ils emploient indifféremment pour distinguer ces deux principes du corps physique. Vous entendez ainsi certaines personnes parler d'esprits se manifestant de différentes façons, ou disserter sur l'immortalité de "l'Âme". En réalité, elles ignorent le véritable sens de ces deux mots : Âme et Esprit.
Essayons donc de trouver une définition que tout le monde puisse comprendre. Nous ne serons sans doute pas tout à fait du même avis en ce qui concerne la triple division si vous possédez une autre division à laquelle vous êtes plus habitués, c'est pourquoi mon principal objet est-il de vous donner avant tout une claire définition des deux termes en question. Selon vos aptitudes ou vos tendances, vous la modifierez si bon vous semble, mais c'est naturellement sur elle que je m'appuierai ce soir pour tout ce dont je désire vous entretenir.


QU'EST-CE QUE L'ESPRIT ?


C'est un germe divin qui développe graduellement ses pouvoirs au cours de l'évolution humaine en s'enrobant de la matière à tous ses états, matière qu'il façonne, le temps aidant, [261] pour en faire un instrument propre à sa manifestation.
Nous pourrions dire, plus succinctement, que l'Esprit est un germe divin enrobé dans la matière.
Comme son divin Progéniteur, ce germe possède un triple aspect. Dieu, manifesté dans l'univers, est une Trinité dont les trois attributs se retrouvent dans l'Esprit de l'homme ; employant les termes chrétiens qui nous sont plus familiers, je dirai que l'Esprit Pur exprime à la fois :
La Puissance qui correspond au Père ;
La Sagesse Fils ;
L'Activité créatrice St-Esprit.


Si vous acceptez ces termes familiers, si vous trouvez qu'ils vous aident à mieux comprendre et voulez bien les garder présents à l'esprit un instant, puis les traduire par le mot : Conscience, – (conscience limitée, les trois aspects n'étant pas encore pleinement développés chez l'homme ordinaire), – il vous sera dès lors facile de reconnaitre, chez l'homme de nature spirituelle, et mieux encore dans cette réflexion inférieure dont je vais parler, [262] il vous sera facile de reconnaitre la triple division de notre propre nature spirituelle et d'en obtenir une image nette.
Ce que dans la Divinité nous appelons : Puissance, volonté par laquelle les mondes existent, se retrouve dans la nature spirituelle de l'homme comme : Volonté.
L'aspect Sagesse qui maintient les mondes, se retrouve, dans l'Esprit humain, comme : Raison pure et la Compassion, celle-ci n'étant autre que la Sagesse, le Christ dans l'homme.
Enfin, le troisième aspect, l'Activité créatrice se retrouve dans l'Intelligence, forme la plus élevée, la plus noble de l'Activité créatrice de Dieu.
Si maintenant vous rapprochez les termes qui vous sont plus familiers de ceux qui vous le sont moins, vous arriverez à pouvoir me suivre plus facilement dans ce que je vais vous exposer.
Pensez, en premier lieu, que l'Esprit, le germe divin, doit se manifester en développant graduellement ses pouvoirs latents, c'est-à-dire les trois attributs suprêmes que vous reconnaissez dans la Divinité même.
Passant alors de ce principe le plus élevé de notre nature au principe que saint Paul [263] appelle l'âme, la question suivante se pose : Qu'est-ce que l'Âme par rapport à l'Esprit ?
C'est la réflexion temporaire de l'Esprit éternel dans une matière plus dense ; c'est l'image de ce qui est impérissable ; c'est la réflexion, dans le miroir du monde, de cette vie éternelle qui évolue en traversant les mondes, mais ne partage pas le caractère transitoire des univers en voie de perpétuelles transformations.
L'âme humaine n'est autre que l'Esprit à l'oeuvre dans la matière grossière. Il en résulte qu'en nous-mêmes, – et nous pénétrons là dans un domaine que la Psychologie étudie et s'efforce de comprendre pour le définir, – il en résulte, dis-je, qu'en notre conscience réside l'Âme, réflexion de l'Esprit dans la matière grossière.
En outre, l'Esprit se reflète comme intelligence pure avec toutes ses activités : imagination, jugement, raison, autant de pouvoirs de l'Esprit.
Nous arrivons ensuite à une partie de nous-mêmes que nous appelons nature émotionnelle, réflexion de la pure Sagesse. Cette Compassion, dont je parlais tout à l'heure, se manifeste [264] dans les mondes inférieurs, comme l'Amour le plus noble, le plus élevé, source de toutes les vertus. Le même principe d'unité que l'on désigne, pour le plan spirituel, sous le nom de Sagesse, s'exprime en effet, dans les mondes inférieurs, comme amour ; c'est lui qui rassemble ici-bas les vies séparées, dans un monde où la matière a vaincu l'Esprit, où celui-ci a été obscurci par la matière. L'unité que l'Esprit connait, l'Âme la recherche par l'Amour qui, comme on le sait, tend à l'union, à l'unité ; c'est cette exquise qualité de l'âme qui tend à élever celle-ci vers le monde spirituel.
Ce que nous appelons : Volonté dans les régions supérieures de l'Existence se reflète comme Désir dans les mondes inférieurs.
Une différence doit être établie entre la Volonté et le Désir.
La Volonté est un sentiment nettement déterminé dans l'être ; le Désir, au contraire, résulte de l'attirance qu'exerce, sur l'individu, la vue des objets extérieurs à la conscience.
Vous obéissez au Désir quand vous reculez devant une douleur, quand votre activité s'exerce selon l'attraction ou le sentiment de répulsion que vous éprouvez pour des objets extérieurs à vous. D'autre part, vous obéissez [265] à la Volonté, – attribut spirituel, – quand toute votre nature intérieure, concentrée sur un point nettement déterminé, vous dirige en toute liberté vers le but choisi, vous laissant indifférent devant la joie ou la peine, le gain ou la perte que vous pouvez éprouver dans le monde inférieur en poursuivant ce but.
La Volonté émane du "Moi spirituel", le Désir est provoqué et stimulé par les objets des régions inférieures.
Or, ce qui, dans l'Esprit, est Volonté, se manifeste donc comme Désir dans l'Âme. Vous pouvez, de la sorte, représenter l'Âme par la simple énumération de ses trois attributs :
Le Mental, avec tous ses pouvoirs,
L'Émotion, racine de l'Amour,
Le Désir, réflexion dans le monde inférieur, de la Volonté, principe déterminant.


Considérant votre vie de chaque jour, il vous est désormais facile de conclure que ces trois attributs ne sont autres que la Conscience à l'état de veille, laquelle se manifeste dans la matière dense du cerveau. Vous pouvez, en outre, dans votre conscience à l'état de veille, vous rendre compte des rôles respectifs du mental, de l'émotion et du désir, et vous arriverez à voir que, si limitée, si conditionnée que [266] puisse être cette conscience inférieure que le cerveau de votre corps physique limite, elle n'est autre cependant que cette conscience, plus haute, qui, dans les mondes subtils, se traduit par le mot : Âme, et, dans le monde spirituel, par cet autre mot : Esprit.
Si vous saisissez bien ce schéma et ses subdivisions, vous serez amenés à admettre que la conscience est une et que ses différents aspects sont dus bien plus aux différences de la matière dans laquelle elle s'exprime, qu'à sa nature elle-même.
Que vous l'observiez dans le cerveau, dans le corps subtil ou dans la région de l'Esprit pur, la conscience est une ; elle manifeste partout ses trois modes, ses trois qualités, mais c'est une chose une, c'est nous-mêmes, ou plutôt, c'est ce qui, en nous, est seul réel.
Et maintenant,
Qu'est-ce que le Corps ?


QU'EST-CE QUE LE CORPS ?


Car dans la définition de l'homme telle que la donne saint Paul, intervient un troisième facteur. Tout comme la conscience, le corps se trouve être naturellement soumis aux trois mêmes différenciations. [267]
De même que nous possédons un corps spirituel qui revêt l'Esprit dans les mondes supérieurs de la conscience, nous possédons également ce que saint Paul appelle un corps naturel. "Il y a, dit-il, un corps naturel et un corps spirituel."
Mais ce corps naturel se divise lui-même en deux corps :
Le corps subtil dans lequel l'âme travaille,
Le corps dense dans lequel travaille la conscience à l'état de veille, réflexion, nous le savons, de la conscience plus haute.

Ces deux corps sont, bien entendu, inséparables et peuvent être considérés comme ne formant qu'un seul corps naturel, éphémère, appartenant aux trois mondes transitoires, soient : les mondes :
physique,
astral,
mental (ou céleste).

Il vit un certain temps dans ces trois régions de l'univers, puis les abandonne, restituant à chacune d'elles les éléments qu'il leur emprunta.
Le corps spirituel étant relativement permanent, subsistant durant toute l'existence d'un [268] individu, ne connaissant de par sa nature même ni la naissance ni la mort, phases qu'il traverse sans en être affecté, il s'ensuit que l'individualité, – l'homme spirituel, l'homme réel, – est éternelle et revêt une enveloppe permanente faite de matière empruntée au monde spirituel. Elle développe alors ses pouvoirs, façonne la matière sans varier dans son essence, sans que la conscience cesse de demeurer dans les régions où elle réside, sans même qu'il en résulte, pour la matière, un changement d'état, celle-ci s'organisant simplement et peu à peu, d'une manière plus définitive.
C'est dans le Corps spirituel que se conserve la mémoire de toutes les expériences faites au cours de vos nombreuses incarnations, c'est en lui que demeure votre réelle individualité que les lois de la naissance et de la mort n'atteignent pas. En ce corps que vous possédez encore actuellement, résident toutes vos expériences du passé ; une partie de ces expériences détermine, à chaque naissance, ce que seront les corps nouveaux que l'âme devra revêtir pour recueillir de nouvelles expériences et exercer de nouveaux pouvoirs.
Ainsi donc, l'Esprit, dans le corps spirituel, est la partie de vous-mêmes qui subsiste ; au [269] contraire, l'Âme, dans son corps temporaire, ou plutôt ses corps temporaires subtils et physiques, est soumise à des changements successifs.
Cette triple division de la nature de l'homme étant admise, il vous sera facile de distinguer la conscience supérieure de la conscience inférieure, la conscience épanouie de la conscience en voie d'épanouissement. Vous adopterez, comme point de départ, cette grandiose conception d'après laquelle l'Esprit vivant involue dans une matière de plus en plus dense pour s'en revêtir et l'approprier à ses desseins. En empruntant cette matière, l'Esprit s'enveloppe, temporairement, en un voile qui tout d'abord l'aveugle, mais c'est un voile qu'il ne tardera pas à transformer en un instrument, instrument par l'intermédiaire duquel il connaitra tous les mondes, par l'intermédiaire duquel il entrera en contact avec l'univers tout entier. C'est dans ce but qu'il rassemble autour, de lui de la matière de chaque monde ; c'est dans ce but qu'il s'enrobe de vêtements matériels. En exerçant son activité sur les matériaux dont il s'entoure ainsi, il approprie ceux-ci à ses desseins, les pétrit selon ce qu'il désire en faire, les arrange selon les résultats qu'il désire [270] obtenir, soit un contact toujours plus parfait avec la Matière, condition nécessaire pour devenir maitre des mondes. Et il poursuit ainsi, son oeuvre jusqu'à ce qu'il ait asservi la Matière jusqu'à ce qu'il s'en soit fait son instrument ; alors, mais alors seulement, tous les mondes s'ouvrent devant lui et il peut agir en toute liberté dans chacun d'eux, ce que l'Esprit Pur est incapable de faire. Et en effet, l'Esprit Pur ne peut agir que dans les mondes spirituels auxquels il appartient, hautes et merveilleuses régions où la Divinité elle-même demeure et se manifeste, sans être limitée par la matière dense dont nous subissons les liens. La Divinité émane ces formes grossières de matière pour que les germes divins puissent y être semés et y acquérir les expériences nécessaires à l'éclosion de leurs pouvoirs ; c'est ainsi que la Divinité se manifeste dans la matière, c'est ainsi que les germes divins, après s'être élevés haut au-dessus de la matière où ils auront été semés, devront être devenus maitres de cette matière comme l'est le Père de Lumière d'où ils émanent.
Considérant ainsi le développement de la conscience et l'organisation graduelle des corps, nous serons à même de déterminer le but de [271] ce long développement, lequel consiste à faire de l'Esprit un maitre de la matière, capable d'agir dans tous les mondes. Et si nous pouvons nous faire seulement un aperçu de ce projet grandiose, nous nous rendons compte de la perfection de ce projet comme de l'éclatant triomphe dont nous devons être les héros.
En premier lieu, si nous examinons les aspects inférieurs de la Conscience en nous-mêmes, nous remarquerons qu'il existe une certaine relation entre la Matière et l'Esprit qui, lui, avons-nous dit, subsiste, et qui, par conséquent, est sans cesse présent sur le sentier qui le conduit au monde spirituel supérieur. Les étudiants avancés dans leurs études théosophiques découvrent tous l'existence de cette relation, au fur et à mesure qu'ils pénètrent successivement dans ces mondes divers qu'ils arrivent finalement à dominer. Il s'agit là d'une sorte de communication ininterrompue entre la conscience et la forme, entre l'Esprit et la Matière ; en d'autres termes : chaque changement dans la conscience provoque une vibration correspondante dans la matière ; réciproquement, toute vibration dans la matière provoque un changement dans la conscience. Or, il est dit que cette relation est imposée par le [272] Logos Lui-même au moment où Il confère à la Matière de Son univers, les qualités qu'Il désire y voir ; Il donne aux atomes un mode vibratoire tel, que ceux-ci doivent répondre, avec un synchronisme parfait, au moindre changement dans Sa propre
conscience. De la sorte, cette correspondance est invariablement établie et sans cesse constatée dans son univers tout entier, grandiose royaume d'Esprit-Matière qu'Il régit et où, je le répète, tout changement de la conscience provoque dans la matière un mode vibratoire déterminé et vice-versa.
Cela étant, envisageons ce qu'une personne disposant de la clairvoyance verrait, dans la partie inférieure de l'aura d'un individu, soit par conséquent, dans la matière éthérique ou astrale de cette aura. Choisissons de préférence la partie astrale. La personne clairvoyante verrait un grand nombre de couleurs changeantes traverser l'aura. Ainsi que vos études vous l'ont enseigné, chacune de ces couleurs est une vibration déterminée de la matière, vibration d'une longueur d'onde définie ; or, en examinant ces changements de couleurs dans une aura, vous constaterez, – si vous êtes clairvoyants, – qu'ils sont dus à des états de [273] conscience ou qu'ils provoquent ces derniers.
Voyez une personne plongée dans un état dévotionnel dû par exemple à la prière, spectacle familier à tous ceux qui fréquentent les Églises chrétiennes ; en observant l'aura d'une telle personne, vous la verrez vibrer et prendre la couleur bleue ; le bleu prédominera, l'aura tout entière en sera colorée.
En outre, si vous observez le corps astral d'un indifférent, entré dans l'église sans éprouver de sentiment dévotionnel, vous remarquerez qu'il ne tardera pas à être affecté par les vibrations des corps astrals qui l'entourent ; ces vibrations qui lui sont imposées de l'extérieur provoquent en lui une disposition dévotionnelle.
En résumé, ou c'est l'état de conscience qui détermine des vibrations données dans les corps, ou c'est la vibration qui détermine l'état de conscience.
Étudions la question sous un autre aspect.
Lorsque vous vous sentez de joyeuse humeur, n'avez-vous jamais ressenti l'influence produite sur vous par la vue d'une personne en colère ? N'avez-vous pas remarqué que, peu à peu, vous vous irritez aussi, même si vous n'avez aucun sujet de vous irriter, mais simplement parce [274] que la mauvaise humeur du voisin réagit sur vous ?
Un rigoureux contrôle sur soi-même et sur le corps astral s'impose si l'on veut éviter de pernicieuses influences qu'exercent, sur une disposition d'esprit calme et pacifique, des vibrations particulières.
Si vous n'avez jamais observé ce fait, pensez-y pendant quelques jours et vous vous rendrez compte de votre tendance à reproduire en vous les sentiments qui animent les personnes de votre entourage.
En somme, que se produit-il ?
Le corps astral d'un homme irrité vibre selon l'émotion qu'il éprouve ; les vibrations de celle-ci provoquent dans votre corps astral des vibrations analogues, produisant ainsi, en nous, une disposition analogue à celle de celui qui vous approche. La chose est absolument mécanique, et la colère vous empoigne vous aussi. C'est pourquoi fut conseillé ce précepte de morale bien connu et enseigné par tous les grands instructeurs :
"Rends le Bien pour le Mal."
En réalité, il s'agit là, par un effort délibéré de la conscience, de se mettre dans une disposition d'esprit totalement opposée à celle du [275] voisin. Ce faisant, vous neutralisez les vibrations qui vous parviennent de l'extérieur, votre corps astral vibre sous l'influence de votre bonne émotion au lieu de vibrer sous l'influence des mauvais sentiments extérieurs. De plus, si vous êtes suffisamment exercés, vous pourrez modifier les vibrations néfastes du corps astral de la personne mal disposée, en les harmonisant avec les vôtres. De cette façon vous aurez produit chez votre voisin une émotion supérieure à celle qu'il éprouvait au lieu de vous être laissé influencer par une mauvaise.
Telle est la science des émotions que tout aspirant à la vraie vie devrait connaitre pour diriger sa conduite. Tout d'abord, on lui enseigne la théorie pour qu'il comprenne mieux ce qu'il doit faire ; il met ensuite cette théorie en pratique afin de vérifier, par lui-même, la loi que son instructeur lui a apprise.
Il arrive quelquefois qu'un moraliste se contente de prescrire des préceptes : "Aimez vos ennemis ; faites du bien à ceux qui vous haïssent." À cela, l'auditeur non spiritualisé vous dira : "Pourquoi répondrais-je à la haine par de l'amour ?" La Connaissance, le pourquoi des choses, peut seul vous aider à comprendre la sagesse d'un tel précepte dicté par tous les [276] grands Instructeurs du passé. S'exprimant à une époque où l'autorité possédait encore une certaine valeur, à une époque où le peuple était disposé à suivre les conseils de ceux qu'il jugeait supérieurs à lui, les instructeurs se contentèrent de proclamer la loi ; l'auditeur docile obéissait alors de son mieux. Par contre, en notre siècle de critique et de raisonnement, il devient indispensable de justifier la sagesse des préceptes de morale en expliquant, sans phrases les vérités scientifiques qu'ils contiennent.
L'étude de cette science des émotions est nécessaire si vous désirez obtenir une organisation plus parfaite de vos corps, et des états de conscience supérieurs. Ce travail peut être fait graduellement ; peut-être feriez-vous sagement de lire, à ce sujet, l'oeuvre d'un penseur théosophe 11 ; elle vous apprendrait à apprécier la science des émotions à sa juste valeur et vous deviendriez, pour le monde, une source de bonheur, de paix, de réconfortantes émotions, vous deviendriez un soutien pour les faibles que vous aideriez alors de vos connaissances et de votre force, hâtant ainsi leur acheminement vers le triomphe définitif. [277]
De ce fait, nous acquérons le pouvoir de dompter la matière et de la faire vibrer ainsi que nous voulons qu'elle vibre. Mieux encore, nous pouvons en faire des organes d'expression pour la conscience qui se développe en nous. Ces lois une fois comprises, nous nous rendons compte que, nos corps étant plus parfaitement organisés, nous puissions prendre plus réellement contact avec tous les mondes qui nous entourent.
Afin de rendre la chose plus claire, laissez-moi vous exposer à nouveau la méthode. Quand, au début, le germe spirituel descend et s'enrobe dans la matière qui lui est nécessaire pour son évolution, cette matière n'est pas organisée, elle est nuageuse, informe ; et elle garde encore cet état dans les régions supérieures où la matière n'a pas encore été travaillée par l'Esprit. Dans les trois mondes inférieurs, tout au moins en ce qui vous concerne presque tous, vous qui devez vous compter parmi les plus avancés dans les races actuelles, elle s'organise au point de devenir de véritables instruments pour la conscience.

11 Voir The Science of the Emotions, par Bhagavan Das, Theosophical Publishing Society.

Si nous portons un instant notre attention sur Le corps physique, [278] vous pourrez saisir exactement le sens de ces mots : organisation du corps.


LE CORPS PHYSIQUE


Le corps physique est maintenant pour vous un précieux instrument qui vous permet tout d'abord de connaitre le monde extérieur et d'agir ensuite sur ce monde en appliquant les connaissances que vous avez déjà acquises. Comme vous le savez, le corps possède un système nerveux qui se subdivise en deux parties :
Les nerfs sensitifs et les nerfs moteurs.
Grâce aux premiers vous apprenez à connaitre l'extérieur ; par l'intermédiaire des nerfs moteurs vous agissez sur ce monde extérieur, utilisant la connaissance que vous avez acquise pour amener les résultats que vous désirez obtenir. Le corps physique est parfaitement organisé pour ce travail.
Par l'évolution des sens, par la croissance graduelle de tout le système nerveux, par le développement de votre cerveau, vous êtes arrivés dans une large mesure à maitriser le monde physique avec lequel vous êtes en contact. Tout ce qu'il reste à acquérir ultérieurement n'est comparativement qu'une faible évolution, une évolution de moindre importance, car il ne s'agit pour l'instant que du [279] développement des deux autres sens et de la conquête du royaume de l'éther auquel la science arrive actuellement. Jusqu'ici donc, vous possédez un instrument, celui de votre conscience à l'état de veille. Grâce à lui, l'Esprit et l'âme travaillent parallèlement, car les pouvoirs de l'âme peuvent toujours s'exercer autant que la densité de la matière le permet. Involuer dans la matière grossière équivaut à placer une lumière derrière des plaques de verre de plus en plus épaisses. La lumière reste lumière, mais celle-ci devient plus ou moins perceptible selon l'épaisseur et l'opacité du verre à travers lequel vous la regardez.
Il en est de même pour la lumière de l'Esprit, brillant à travers l'âme et le corps.


LE CORPS ASTRAL


Le travail qu'il importe maintenant de faire est celui qui comporte l'organisation d'un corps de matière plus subtile :
Le corps astral.
Dans ce corps, agissent les émotions, les pensées. Dans une large mesure, les corps astral et mental, – le premier étant aussi appelé le corps émotionnel, sont dès maintenant constitués. Mais ici interviennent certaines [280] différenciations ; chez quelques-uns d'entre nous le corps astral est si bien constitué qu'il est susceptible de se séparer du corps physique pour agir dans le monde auquel il appartient, c'est-à-dire dans le monde astral ; chez d'autres, ce corps est plus suffisamment développé en ce qui concerne la conscience, mais pas assez cependant pour recevoir complètement les impressions du monde astral lui-même. En d'autres mots, votre conscience agira dans la matière subtile de ce monde, mais elle n'a pas encore suffisamment organisé le corps astral pour permettre à celui-ci de recevoir les impressions de l'extérieur.
Graduellement, au fur et à mesure que l'évolution s'avance, l'organisation du corps astral progressera en chacun de nous ; mais on peut, comme je vous l'ai dit il y a quelques semaines ; hâter cette évolution et faire du corps astral ce qu'il devrait être, c'est-à-dire un instrument qui soit aussi parfait pour le contact avec le monde astral, que l'est le corps physique pour le monde physique. C'est là ce qu'ont fait un grand nombre de personnes qui peuvent agir dans ou en dehors de leur corps physique. Nous reviendrons dans un instant sur ces deux cas.
Prenons d'abord la partie plus subtile du corps [281] mental. Chez la plupart d'entre vous, ce corps est complètement organisé mais il n'est organisé que pour agir en vous-mêmes et non pour recevoir du monde mental extérieur tout ce qu'il sera capable de recevoir pour l'utiliser ensuite. Mais bien peu nombreux sont ceux d'entre vous qui peuvent quitter les corps physique et astral pour vivre dans le monde mental, en pleine conscience, et y agir aussi délibérément que dans le monde physique.
Quels sont les signes par lesquels vous pourrez juger des progrès obtenus dans l'organisation des corps astral et mental, en supposant toutefois que vous cherchiez à hâter cette organisation ?
Prenons d'abord le travail effectué dans le corps physique. À mesure que les formes supérieures de la conscience commencent à se coordonner avec le corps physique et à lui transmettre plus parfaitement les impressions qu'elles reçoivent, le corps mental se perfectionne dans une grande proportion. Chez les hommes de science, prompts à saisir les principes scientifiques et doués d'un grand pouvoir d'observation, capables de tirer des déductions des observations qui ont été faites, chez de tels individus l'organisation du corps [282] mental fait de rapides progrès. Les savants modernes possèdent donc un corps mental très hautement développé, en ce qui concerne du moins l'utilisation de la conscience à l'état de veille, car ce corps mental est trop imparfait encore pour recevoir directement les impacts des plans supérieurs.
Le développement du corps astral se manifestera par l'amour de l'art et des émotions élevées, et si celles-ci atteignent plus facilement la conscience, c'est qu'alors votre corps astral s'organise d'une façon définitive.
Quand le corps mental, ce corps permanent qui atteint au corps spirituel, s'organise, le progrès se manifeste par des facultés de haute métaphysique, par une grande profondeur de pensée philosophique, par une attirance spéciale vers les conceptions les plus élevées de l'idéal artistique et vers les plus belles oeuvres de l'idéal littéraire.
Telles sont les facultés qui apparaissent au début de l'organisation du corps spirituel de l'homme qui s'élève au-dessus des choses transitoires, commençant à modeler l'instrument permanent de l'Esprit. Chez l'artiste, le véritable artiste, le corps mental est complètement organisé. Chez les plus grands génies, le [283] corps spirituel commence son organisation. Car le génie possède un corps spirituel organisé de telle façon qu'il rayonne, dans les corps inférieurs, un savoir qui ne peut être acquis que dans les hautes régions de l'Esprit. Chez les puissants génies de l'histoire qui ont survécu aux générations passées et qui brillent de l'éclat le plus pur dans le monde de la pensée, l'art et la littérature étaient illuminés par l'Esprit.
Quels sont les autres signes susceptibles de nous indiquer que ces corps à travers lesquels doit s'exercer la conscience, sont organisés ? En premier lieu il y a le génie, exception faite de Celui dont je vous ai parlé en tant que manifestation du Christ, Sagesse-Esprit dans un corps humain. Mais, en dehors de ces manifestations grandioses de l'épanouissement de la conscience, quels sont les signes autour de nous qui nous révèleront les degrés de perfection atteints par les corps supérieurs et dans cet épanouissement de la conscience ?
Bien des indices nous prouvent aujourd'hui que le corps astral est en voie de complète organisation ; comme l'on nie l'existence de ces indices lorsqu'il s'agit d'expliquer le génie, la néo-psychologie demeure impuissante et reste stationnaire. [284]
L'organisation du corps astral se manifeste par le pouvoir qu'on a de recevoir directement les impressions du plan astral et de les transmettre à la conscience à l'état de veille. Pour le corps physique, ces premiers indices se montrent dans l'exercice de La télépathie.


LA TÉLÉPATHIE


Grâce à elle les individus sont susceptibles de communiquer les uns avec les autres sans le secours des moyens physiques ordinaires de communication. C'est là un cas assez fréquemment rencontré chez les grands penseurs de notre époque. Vous pouvez, si vous le désirez, développer ce pouvoir par une pratique régulière et définie, mais il arrive trop souvent qu'après avoir essayé pendant quelques semaines sans avoir obtenu de résultats probants, l'on abandonne les essais, oubliant qu'une patience inlassable est nécessaire pour arriver au but poursuivi.
La loi est immuable ; si vous concentrez votre esprit jusqu'à ce qu'une image y soit nettement représentée, cette image sera reproduite dans le monde astral ; par un effort de volonté vous pouvez transmettre cette image [285] à la personne que vous aurez désignée pour la réception du message. Si vous vous appliquez régulièrement à cette pratique jour après jour, mois après mois et même des années et des années durant, vous arriverez à pouvoir effectuer la transmission de pensée qui vous permettra de communiquer avec les absents aussi surement que sur le plan physique. Cet entrainement ne peut être que bienfaisant car il développe la volonté, il fortifie la concentration de pensée. Mais rappelez-vous que sans efforts persistants, il vous faudra un temps considérable avant d'obtenir des résultats tangibles dans le monde extérieur. Une personne qui ne peut fixer son esprit pendant une ou deux minutes sur un même sujet ou sur une pensée quelconque, ne sera jamais capable de transmettre ce qu'elle est incapable de créer pour elle-même.
La concentration intense est un des moyens d'organiser les corps astral et mental et d'en faire des instruments pour la conscience en voie d'épanouissement complet. Cette faculté est innée chez certaines personnes, chez celles qui, dans des existences antérieures, se sont attachées à la développer. La nature ne donne rien pour rien. D'un autre côté, la nature est une bonne créancière qui règle loyalement sans [286] rien retenir, tout ce que vous avez gagné ; si la concentration est chose aisée pour vous, c'est que vous l'avez pratiquée autrefois. Si, au contraire elle vous est difficile, c'est que vous commencez seulement maintenant à exercer cette faculté.


DES RÊVES


Il est une autre forme sous laquelle le corps astral manifeste son développement, lorsqu'au moment du sommeil, il se sépare du corps physique ; il s'agit ici Des rêves.
Quelques rêves ne sont produits que par un travail cérébral, inconscient ; c'est précisément parce que l'on n'établit aucune distinction entre les différentes sortes de rêves que l'on n'attache d'importance à aucun d'eux. Il est parfaitement vrai que les rêves résultent le plus souvent de troubles physiques tels que mauvaise circulation du sang, pulsation artérielle dans le cerveau, etc. C'est là ce que nous appelons le rêve physique, c'est-à-dire le rêve incohérent, dénué de sens comme de toute inspiration. Le rêve qui, lui, nous montre la bonne organisation du corps astral, est au contraire celui qui transmet au cerveau physique les éléments de [287] connaissance que vous ne possédiez pas auparavant, ou qui vous permet de communiquer avec une personne décédée que vous pouvez rencontrer sur le plan astral lorsque vous avez vous-même quitté momentanément le corps physique. Ce sont là les rêves cohérents, rationnels et souvent inspirés.
Rappelez-vous les nombreux témoignages de personnes ayant eu des rêves qui leur ont appris des choses qu'elles ignoraient à l'état de veille, rêves qui leur ont donné la solution de problèmes incompris jusqu'alors. Le livre de Myers sur la Personnalité humaine renferme de nombreux exemples à ce sujet ; et si, par votre propre expérience, vous arrivez à constater que ces sortes de rêves deviennent de plus en plus fréquents, vous pouvez être surs que votre corps astral se transforme en un véhicule qui permettra à la conscience de s'exprimer librement, et d'une manière effective, sur le plan astral.
Dans certains rêves, il est vrai, et principalement dans les rêves prémonitoires, des idées peuvent vous être transmises de l'extérieur quand vous n'avez pu les découvrir par vous-mêmes. De tels avertissements peuvent vous être donnés par l'intermédiaire d'un ami, d'un [288] aide invisible, de quelqu'un que vous aimez et qui a quitté la vie terrestre ; vous exercerez là la vision astrale.
Dans tous les cas, ces phénomènes sont perçus d'abord par la conscience supérieure pour arriver ensuite à la conscience limitée, et, au fur et à mesure que le corps astral se perfectionne, les rêves lucides deviennent de plus en plus fréquents, le corps astral n'a plus besoin de quitter le véhicule physique pour exercer ses pouvoirs. Vous pourrez voir et entendre à l'aide de vos sens astraux alors même que les sens physiques sont actifs, que la conscience fonctionne normalement dans le cerveau ; par suite, les corps physique et astral arrivant lentement et graduellement à s'unifier, vous vivrez simultanément dans les deux mondes, fonctionnant indistinctement, et à votre gré, sur l'un et sur l'autre. Vous aurez ainsi développé la conscience supérieure par laquelle l'âme s'exprime dans le corps astral.


MÉDITATION INTENSE ET RÉGULIÈRE


Pour les mondes supérieurs tels que le monde mental, l'évolution se poursuivra exactement de la même manière ; mais pour cela, une condition s'impose en ce qui concerne la conscience et son développement : [289]
C'est la méditation intense et régulière.
Il n'est pas d'autre moyen. Si l'on vient vous dire que l'on peut développer la conscience par des moyens physiques, vous pouvez répondre à de telles personnes qu'elles sont dans l'erreur. On peut, il est vrai, éveiller la conscience sur les plans inférieurs du monde astral en provoquant dans le corps physique, des vibrations qui affectent la matière astrale, d'où résulte une modification de la conscience dans la région la plus inférieure du monde astral ; mais vous ne pouvez aller plus loin.
J'ai vu employer, dans les Indes, certaines méthodes physiques très difficiles à suivre et dont aucun d'entre vous ne voudrait faire usage car elles vouent le corps humain à une rapide destruction. J'ai vu des hommes pouvant quitter leur corps physique et vivre pendant un certain temps dans le monde astral, mais ils demeurent inconscients dans leur enveloppe astrale ; ils ne peuvent ni se mettre en contact avec ce monde, ni à plus forte raison y faire fonctionner leur conscience supérieure. Ils n'ont fait que forcer l'entrée du monde astral où ils pénètrent avec un corps subtil [290] qui n'est pas suffisamment organisé pour recevoir les impressions de ce monde, leur conscience n'étant pas non plus suffisamment développée pour les comprendre. Par cette pratique, ils ne réussissent donc qu'à nuire à leur cerveau, ils ne rapportent aucun résultat utile dans le monde terrestre, perdant ainsi les deux mondes, au lieu de gagner la région supérieure qu'ils recherchent.
Ce ne sont par conséquent pas là des méthodes à répandre en Occident, bien qu'un grand nombre de livres soi-disant occultes et provenant d'Amérique enseignent ces pratiques par lesquelles, disent-ils, il sera possible d'influencer autrui dans les affaires commerciales, d'hypnotiser les gens pour un bénéfice personnel. Partout où cette méthode est employée dans un but semblable, soyez certains qu'il s'agit d'une forme de développement et d'évolution qui ne peut que nuire et non servir. Le pire qu'on puisse attendre de ces méthodes, c'est l'atrophie de certaines parties du cerveau qui, plus tard, seront nécessaires pour un travail effectif, lorsque la conscience supérieure sera en pleine activité et que le corps mental sera dument organisé. Par ces moyens vous nuisez au cerveau ; au lieu d'obtenir une [291] communication entre le monde physique et le monde astral, vous vous refusez toute espèce de pouvoir jusqu'au moment où vous revêtirez un nouveau corps, pour continuer le développement supérieur que vous vous proposez d'atteindre. Ce danger guette les gens qui voudront utiliser les fragments de l'antique science orientale, sans connaitre les moyens de protection dont s'entourent les Orientaux lorsqu'ils se livrent à cette science. L'on rencontre occasionnellement, en Orient, des gens dont la forme physique est déprimée et dont le corps astral n'est pas développé ; l'on peut se rendre compte combien ces méthodes sont plus dangereuses encore pour les Occidentaux dont l'hérédité physique est si différente, et qui ne remplissent aucune des conditions imposées aux Orientaux.
La méditation est donc le seul moyen sûr de développer la conscience et d'organiser ainsi le véhicule ; l'autre condition est la pureté de pensée, de désirs, pureté dans la vie physique ; tel est le côté matériel de l'entrainement. Sans les pensées pures, le corps mental sera impropre pour un développement supérieur, sans la pureté dans les désirs, le corps astral sera impropre au développement que vous [292] cherchez ; le corps physique enfin doit être pur pour recevoir les impressions des corps mental et astral et vibrer sous leur influence ; autrement l'hystérie se substituera au développement de la conscience supérieure, ce qui d'ailleurs est le but de vos efforts.
Telles sont, sommairement, les conditions obligatoires : la méditation pour la conscience, la pureté pour l'évolution de son instrument. Si vous êtes prêts à les accepter, la voie d'une évolution supérieure vous est ouverte et, de votre courage, de votre persévérance et de vos capacités dépend la rapidité avec laquelle vous avancerez. Votre but doit être de secourir autrui, d'obtenir ces pouvoirs afin d'être utiles et non pour vous élever au-dessus des autres.
Pour juger la pureté de vos motifs il n'y a qu'un seul critérium : Faites-vous usage des pouvoirs que vous possédez maintenant pour aider l'humanité ? Sinon, n'ayez alors aucun espoir pour l'obtention des pouvoirs supérieurs ; les efforts physiques seuls ne suffisent pas pour les acquérir.
J'ai rencontré de nombreuses personnes pressées de devenir des aides invisibles, – c'est-à-dire des travailleurs sur le plan astral, – alors qu'avec les pouvoirs dont ils disposent, [293] ils ne sont pas même des aides visibles sur le plan physique. Aussi je ne comprends pas bien pourquoi les gens sont si désireux de visiter les malheureux de l'astral alors que dans le monde physique, ils s'écartent systématiquement des infortunés qui sont à leur portée.
Vous avez le droit d'aller aussi loin que vos propres pouvoirs vous le permettent ; mais si vous demandez l'aide de Ceux qui sont plus hautement développés, – des grands Instructeurs de la race, – vous devez apporter la preuve, non pas la preuve en paroles mais une preuve vivante, que vous employez utilement vos facultés actuelles. Alors, seulement, vous méritez d'être aidés pour acquérir des facultés supérieures. Tel est le sens caché de ces étranges paroles attribuées au Christ : "Il sera donné à celui qui possède beaucoup." Ceux-là seuls qui font bon emploi des pouvoirs qu'ils ont, peuvent être aidés et obtenir davantage, car, par leur vie, ils montrent qu'ils ont fait le meilleur usage possible de leurs facultés, donnant ainsi l'espoir qu'ils agiront de même pour l'humanité, lorsque de plus grands pouvoirs leur auront été conférés.
Dans les règles imposées jadis à ceux qui aspiraient à l'état de disciple, il était dit que, [294] lorsque le candidat venait au Maitre, il devait apporter avec lui le combustible qui devait alimenter le feu, le feu du Sacrifice ; le combustible représentait tout ce que le futur disciple possédait en esprit, corps et biens ; il apportait tout cela au Maitre comme offrande, et alors seulement il était accepté par "Celui qui savait".
De même, à présent, cette évolution supérieure, hâtée par le pouvoir des grands Êtres, ne peut être ouverte qu'à ceux qui apportent le combustible destiné au feu du Sacrifie. Vous devez être prêts à abandonner tout ce qui vous appartient sans en rien retenir, biens matériels ou spirituels ; vous devez offrir tout ce que vous avez et toute votre vie, pour le service du Grand Être dont vous réclamez le don de Connaissance. Ce sacrifice accompli, le don n'est jamais refusé, la porte ne reste jamais fermée à quiconque se présente les mains pleines. Le chemin est étroit, c'est vrai ; maintenant, comme jadis, étroite est la porte, étroit est le chemin qui conduit à la vie, et peu nombreux sont ceux qui suivent le sentier.
Ce petit nombre ne dépend pas d'un maitre avare ; il provient seulement du peu de confiance de la part du disciple. Apportez tout ce [295] que vous avez et votre être tout entier aux pieds du Maitre de sagesse ! Il ouvrira la porte et vous guidera sur le sentier. Mais ne croyez pas que les paroles soient entendues dans ces régions élevées où le Maitre vit et respire ; seules les pensées élevées peuvent L'atteindre, seuls les actes généreux peuvent témoigner des bonnes pensées que vous avez conçues ; car là, auprès du Maitre, seuls sont entendus les échos d'une vie réellement vécue, d'une vie de sacrifice, la seule qui soit digne de recevoir la Connaissance des mains du Grand Être.

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