UNION

LES ENSEIGNEMENTS DES MAITRES DE LA HIERARCHIE

LES BASES DU MONDE NOUVEAU Une compilation de textes d'Annie BESANT - 1944

LES BASES DU MONDE NOUVEAU 7 — L'INDE

LES BASES DU MONDE NOUVEAU

7 — L'INDE


7. Pensez à l'Inde et à la guerre, et au fait qu'elle a été préservée de l'invasion. Quel est le dharma particulier de l'Inde pour qu'elle ait été protégée par la Grande-Bretagne et pour que ces deux pays soient liés en un Commonwealth indo-britannique ? Et n'est-ce pas un karma particulier qui retarde l'obtention par l'Inde d'un gouvernement autonome ?


LA MISSION DE L'INDE


L'Inde est le creuset dans lequel ont été jetés les métaux raciaux et religieux pour y fusionner en un nouvel alliage précieux et magnifique qui enrichira l'Humanité d'un trésor sans prix (61).
Mais parce que l'Inde a payé ses fautes par d'amères souffrances, parce que, pendant deux siècles, on lui a causé des torts sans qu'elle-même en causât, parce qu'elle a été la victime et non l'oppresseur, la spoliée et non le spoliateur, il lui a été épargné aujourd'hui d'être jetée dans le creuset bouillonnant dans lequel agonise l'Europe actuelle (62).
L'affirmation perpétuelle de la spiritualité en tant que meilleur des biens, telle est la mission de l'Inde dans le monde. De même que son passé glorieux est né de sa science spirituelle, et de sa dévotion, de même son avenir devra être basé sur la réaffirmation et la [78] résurrection de ces principes. Son génie est tourné vers la religion et non vers la politique et ses fils les plus doués sont nécessaires comme maitres spirituels et non comme candidats dans l'arène politique. Que l'on laisse les nations et les hommes de moindre valeur lutter pour obtenir des conquêtes, la première place et le pouvoir. C'est là une marchandise de pacotille bonne pour des enfants et il convient de laisser les enfants se quereller entre eux à leur sujet. L'Inde est le seul pays au monde où il soit encore facile d'être religieux, où l'atmosphère du pays et les courants psychiques ne sont pas encore entièrement pénétrés de matérialisme. Si la religion périssait ici, elle périrait partout. C'est à l'Inde que revient la tâche sacrée de maintenir allumé le flambeau de l'esprit dans le brouillard et les tempêtes du matérialisme croissant. Si elle laissait tomber de ses mains ce flambeau, la flamme en serait éteinte par le piétinement de la multitude qui se rue vers les biens terrestres. L'Inde, si sa spiritualité lui était ravie, n'aurait plus d'avenir : elle entrerait dans les ténèbres comme y sont entrées la Grèce et Rome (63).
L'avenir n'est pas dans le corps matériel ; il est dans l'âme. Le corps meurt, l'âme est immortelle. Les civilisations s'élèvent et retombent, mais l'esprit de l'homme perdure à jamais. Semblable à ce dont il est émané, il est indivisible et immortel, non-né et non-mort ! un corps après l'autre lui sert de vêtement qu'il rejette lorsqu'il est usé et inutilisable. Telle est la mission de l'Inde dans le monde et c'est pour cet enseignement qu'elle a droit à l'amour et à l'hommage de l'espèce humaine (64).
… Il n'est point de pays au monde où la propagation de la Théosophie soit une nécessité vitale autant que sur cette vaste péninsule qu'est notre Empire indien. [79]
Dans l'Inde, toutes les grandes religions du monde vivent côte à côte… Aucune d'elles ne se sent réellement étrangère dans cette grande maison de la mère-patrie qui les étreint toutes entre ses bras aimants. Elle sait qu'il n'y a pas, qu'il ne doit pas y avoir de bannis dans la famille indienne, et la nation indienne comprend des Indous et des Musulmans, des Bouddhistes, des Parsis et des Hébreux, des Chrétiens, des Sikhs et des Jains. Toutes les croyances se trouvent ici.
Si vous comprenez que toutes les religions sont une ; si, sans vous nommer Théosophes – je n'attache pas d'importance aux étiquettes – vous admettez l'esprit théosophique qui dit que toutes les religions n'en sont qu'une et qu'elles ne sont qu'autant de chemins vers Dieu ; si vous croyez à la grande parole de Shri Krishna : "L'Humanité vient à moi par bien des chemins et quelle que soit la route par laquelle un homme s'approche de moi, je lui donne la bienvenue" ; si vous y pensez et si vous vivez en conséquence ; si vous renoncez à toute forme de haine ; si vous ne prononcez jamais les mots : infidèle, hors-caste, mlechchha ; si vous dites : "mon frère musulman, mon frère indou, mon frère chrétien", ah ! l'Inde deviendra alors ce qu'elle devrait être, la nation modèle du spiritualisme, la nation modèle de la religion ; car tous seront les enfants d'Un même Dieu ; tous seront les voyageurs qui se dirigent vers Un même foyer ; tous partageront Un même espoir. C'est cela, la Théosophie et c'est cela l'Esprit qui fera l'Inde grande (65) ! Nous ne connaissons pas la valeur de la terre que nous possédons actuellement. Si seulement nous l'aimions, si nous lui faisions confiance, si nous Croyions en elle, nous n'aurions pas dans l'Empire de pays plus loyal que celui qui se nomme l'Inde. Il faut [80] que nous remplacions la méfiance par la confiance. Il faut que nous donnions la liberté au lieu de persister dans l'autocratie. Il nous faut comprendre que nous avons affaire à des égaux et non à des inférieurs. Si nous agissons ainsi, alors tout ira bien entre l'Inde et la Grande-Bretagne (58).
L'écroulement de la civilisation occidentale au cours de la guerre, la nécessaire reconstruction de l'Empire britannique, qui suivra la conclusion de la Paix, les conditions économiques nécessaires à la prospérité future de L'Empire et que ce dernier devra créer, tout cela impose une limite de temps inexorable à la lutte immédiate pour la liberté de l'Inde. Si l'Inde n'entre pas en qualité de nation libre dans la conférence qui tracera les lignes du Commonwealth futur, elle en sortira économiquement esclave. Il nous faut donc prendre des mesures pour nous adapter à cette limitation de temps (66).


LE KARMA DE L'INDE


Puisque les Seigneurs du Karma régissent les nations de même qu'ils régissent les hommes, le fait que nous ayons parmi nous une classe d'êtres nés "intouchables" et que l'on nomme ainsi, est l'un des plus grands obstacles à la situation élevée que l'Inde devrait occuper parmi les nations… Si l'on compare les conditions d'existence dans l'Inde avec celle des autres nations, on n'en voit – autant que je sache –, aucune autre où le fait d'être née dans une certaine classe de la société rende une personne "intouchable" pour toute autre née sur le même territoire. Je pense que cette particularité (et je trouve cela juste) est, pour l'Inde, un obstacle qui se dresse sur le chemin [81] de sa liberté. Aussi longtemps qu'elle opprimera une certaine classe de gens déclarés "intouchables" par leurs compatriotes, il ne pourra y exister aucune véritable croyance en la Fraternité… Je ne suis pas du tout certaine que le plus grand obstacle à la liberté de l'Inde ne soit pas le fait honteux qu'elle opprime une grande partie de sa population (13).
L'Inde ne peut vivre si elle persiste à renier la Fraternité en tolérant qu'une partie de sa population soit intouchable pour l'autre partie, considérée plus propre… C'est là qu'est votre crime envers la Fraternité. L'Inde ne peut prétendre à occuper une place élevée parmi les nations tant qu'elle n'aura pas entrepris de relever sa population de hors-castes.
Et c'est ainsi que je vous dis, mes Frères : "Prenez garde à vous-mêmes ; les plus grandes possibilités s'ouvrent devant vous dans un avenir proche ; elles seront vôtres si vos mains sont propres et votre coeur pur. Aucune nation où les pauvres étaient méprisés n'a pu vivre. Les épisodes du passé vous avertissent des dangers de l'heure présente. Vivez selon la loi de la Fraternité : sauvez les misérables, instruisez les ignorants, nourrissez ceux
qui ont faim, soignez les malades. Et le Deva de l'Inde répandra sur elle sa bénédiction si elle suit la Loi qu'elle a toujours admise en théorie. Son avenir aura plus de puissance que n'en a eu son passé ; il sera la résurrection de l'esprit et la spiritualisation de la chair (67)."
Qu'est-ce donc qui a sauvé l'Inde – cette Inde qui a commercé avec Babylone, avec la Perse, avec l'Égypte, avec Rome ? Ce qui l'a sauvée, c'est qu'elle n'a jamais complètement perdu de vue le grand principe de la Fraternité car, comme l'a enseigné Manou : que le Shudra soit considéré comme le plus jeune fils de la famille – qu'il soit un membre de la famille, [82] qu'il ne soit pas maintenu hors de son enceinte. Et bien que l'Inde ait gravement péché en cette matière, elle n'a pas commis de péché mortel ; bien qu'elle ait oublié, elle n'a pas perdu entièrement la mémoire d'un passé plus fraternel ; elle a payé ses transgressions par de nombreuses tribulations ; elle a payé par bien des souffrances sa dette envers le Karma national et son expiation finale a été de devenir la servante d'une autre nation. Elle a ainsi pleinement acquitté la dette du Karma qu'elle s'est faite (68).
Ainsi, ne craignez pas l'Esprit de l'Âge, mais efforcez-vous de le comprendre et d'acquérir les qualités qu'il doit développer en nous. Plutôt que de nous opposer à lui il nous faut utiliser son message et l'Inde aura peut-être la chance de passer dans le Nouvel Âge sans avoir à faire face à autant de conflits que l'Occident, où l'Esprit agité de l'Âge a trouvé dans la turbulente cinquième sous-race sa plus parfaite incarnation. L'Inde peut développer en elle l'esprit concret qui est nécessaire sans payer pour cela un prix aussi élevé que celui que paient actuellement nos frères d'Europe ; car il n'y a qu'une Humanité, où tous peuvent partager ce que chacun a acquis. En étudiant les troubles causés par l'évolution occidentale, l'Inde peut apprendre quels sont les pièges à éviter, quelles sont les tendances à encourager et celles auxquelles il faut s'opposer. Elle peut utiliser l'expérience acquise par les nations plus jeunes, trier les fleurs qu'elles ont cueillies et laisser de côté les herbes vénéneuses. Son passé spirituel et son tempérament philosophique peuvent lui permettre d'éviter d'être entrainée dans la cataracte bouillonnante des rivalités de la civilisation moderne, et de traverser les rapides en étant seulement éclaboussée par leur écume, pour aboutir aux eaux calmes de la civilisation bouddhique. Dans [83] cette civilisation, l'Esprit de l'Âge sera celui de la Raison pure, de la tendre compassion. Tout ce que l'Occident et l'Orient ont de noble se trouvera fondu, dans cette civilisation. Dans cette civilisation, l'Inde, mère des Religions, instructeur suprême de l'Esprit Unique et de la Solidarité de
l'Espèce humaine, sera, par droit inattaquable, prêtre et guide de l'Humanité (69).


GRANDEUR ET DESTINÉE DE L'INDE


L'Inde vit, et elle vit aujourd'hui d'une vie nouvelle. Si, il y a quelques années, elle a traversé une période de sommeil, c'est qu'il faut parfois que les nations dorment pour renouveler leur vigueur et leur force. Mais alors qu'elle est passée par le brasier de l'affliction, alors qu'elle a été humiliée, alors qu'elle a été vaincue, elle n'a jamais été déshonorée et elle n'a jamais perdu sa place parmi les nations immortelles du monde. Sachant et croyant cela, ayant compris que c'était ma Théosophie qui avait dirigé mon coeur presque entièrement vers l'Inde – bien que je l'eusse servie pendant une dizaine d'années avant que cette grande joie vînt à moi –, c'est donc sachant cela et regardant son passé que j'ose dire que son avenir sera plus grand encore ; qu'elle s'élèvera, qu'elle instruira et aidera une fois de plus le monde. Elle n'a pas traversé sept mille années de vie et de prospérité, admises même en Occident, sans en avoir tiré quelques leçons, non seulement en matière de religion, de philosophie, d'intellectualisme, de draine et d'art, mais aussi de science politique et de connaissance de la nature humaine. Une telle nation a quelque chose à enseigner à l'Occident en matière d'organisation [84] politique et en d'autres matières également. L'Inde ne sera pas seulement l'instructeur spirituel de l'espèce humaine, le fleuron le plus radieux de sa couronne, mais elle saura aussi la conduire hors des chemins de la démocratie occidentale pour laquelle seuls comptent les individus et jamais le mérite ou les idées. Hors de ces chemins, elle la conduira vers cette forme plus vraie et plus noble de la démocratie où la Sagesse sera guide, où la Force sera utile, où le gout de servir sera l'achèvement de la vie publique. L'Inde fera de la Démocratie ce qu'elle doit être, lorsque le roi est considéré comme le premier serviteur du peuple. Je crois que ce sera là le plus grand triomphe de l'Inde. Lorsque les jeunes nations d'Occident auront échoué, l'Inde, la Mère, féra de la démocratie le modèle d'un monde prospère et heureux (70).
J'ai parlé d'une civilisation, celle de l'Inde, qui a perduré pendant toute cette période (7 000 ans). La raison de cette longévité est que dès la fondation de sa société une tentative très nette a été faite pour y introduire le principe de la Fraternité. C'est pour cela qu'elle a vécu. Elle avait compris que la Fraternité humaine était basée sur cette vérité essentielle qu'en chaque
homme se trouve un fragment de la Vie divine, la racine de l'égalité fondamentale de tous (31).
Si l'Inde a survécu à tous ceux qui furent ses contemporains il y a cinq mille ans, c'est que son organisme national a conservé vivant l'esprit d'autrefois. Elle a traversé bien des vallées de larmes mais elle n'est jamais entrée dans la vallée obscure de la mort ; elle a été envahie : elle a assimilé ses envahisseurs ; son type ethnique, aryen, malgré de nombreux croisements, survit encore dans une minorité ; son ancien idiome existe toujours, bien qu'il ait donné naissance à de nombreux dialectes qui sont devenus de grands [85] idiomes. Ses gouvernements ont changé de forme et elle a traversé des périodes d'anarchie locale – locale seulement – et aujourd'hui, dans sa jeunesse rénovée, telle le Phoenix elle surgit de ses cendres, elle sort du hucher de la sujétion temporaire, toujours semblable à elle-même mais purifiée, enrichie, prête pour un avenir plus grand que ne l'a été son passé (71).
L'impression générale de l'Inde que l'on peut retirer d'une vue d'ensemble, telle que celle que permet l'Arthashastra est celle d'un vaste pays, présentant des formes très diverses de gouvernement, qui tente de nombreuses expériences, qui discute avec un vif intérêt de nombreux problèmes politiques, un pays palpitant de vie et d'idées, riche, heureux, libre et prospère. Nous comprenons que sa puissante littérature spirituelle, sa philosophie, son histoire épique, sont nées d'un sol riche de civilisation, matérielle et intellectuelle, et, en même temps, spirituelle. L'Inde, la plus ancienne des nations vivantes, est un pays dont l'Hier splendide promet un Demain de gloire sans rivale (72).


LE PROCHAIN PAS EN AVANT DE L'INDE


Il convient de suggérer à ceux qui prendront part à la formation future de l'Inde les lignes qu'ils devront suivre pour que le travail qu'ils réaliseront soit le plus profitable et amène les résultats les plus bénéfiques. Ceux qui, à l'heure actuelle, réfléchissent à l'avenir politique de l'Inde envisagent, pour la plupart, de composer une mauvaise copie des modalités et des méthodes occidentales, plutôt que de choisir une ligne qui corresponde au génie de l'Inde et qui s'adapte à son Histoire. La civilisation occidentale, basée sur les luttes et l'affirmation des droits, est en train d'essayer [86] d'émerger d'un chaos politique et économique pour entrer dans un ordre quelconque. Pourquoi la civilisation orientale, basée sur la paix et l'application des
devoirs, se jetterait-elle sans raison dans le tourbillon d'où l'Occident essaye de sortir ? Il est bien préférable d'étudier ses idéaux anciens et de chercher à les adapter aux circonstances présentes. C'est alors seulement que l'édifice construit sur les fondations laissées par le passé de l'Inde sera durable. Une nation qui a un passé ne peut se permettre d'ignorer ce passé lorsqu'elle travaille pour l'avenir ; il est raisonnable qu'un architecte examine les matériaux dont il dispose avant de dresser les plans de l'édifice qu'il veut bâtir (73).
Malgré l'antagonisme que nous pouvons observer autour de nous et qui, de temps à autre, allume un brasier entre nos frères indous et musulmans, le sens de l'unité va croissant, il existe une unité croissante qui deviendra manifeste avant qu'il soit longtemps (74).
Aux temps anciens, elle (l'Inde) était l'instructeur du monde et, à l'heure actuelle, les nations sont préparées à lui reconnaitre de nouveau ce caractère noble et sacré. Dans le monde entier on commence à assimiler ses grands enseignements, par ce véhicule qu'est une langue universelle. Ses enseignements étant de plus en plus largement acceptés, quel sera l'enseignement suprême qui apparaitra comme la note-clé de la prochaine civilisation ?
Le grand enseignement de l'Inde, le plus précieux, le plus vital, celui dont la portée est la plus vaste, est l'unité du Moi, le Moi unique dans lequel se trouvent toutes choses, qui vit et se meut en tout.
… Si cette possession de l'enseignement doit porter ses fruits, quel est le prochain pas que l'Inde devra entreprendre ? Elle doit s'adapter à sa haute position et [87] bâtir une nation qui soit digne d'être l'instructeur spirituel de l'espèce humaine. Si l'Inde peut faire cela, si elle peut rebâtir sa religion dans la pureté des idéaux anciens et qu'elle soit en possession de toutes les forces spirituelles qui sont l'héritage de son passé ; si elle peut inculquer à ses enfants la noblesse de caractère, la pureté des moeurs, l'élévation de l'intelligence, la spiritualisation des aspirations, alors elle ne jouera plus dans l'Empire mondial le rôle d'une nation conquise, mais fera partie intégrante de cet empire, elle sera honorée comme instructeur et guide religieux des nations du monde. Elle cessera d'être une nation assujettie et fera partie d'un Commonwealth puissant ; certains de ses fils porteront une partie du fardeau de l'Empire mondial en qualité de conseillers et de gouvernants tandis que ses instructeurs spiritualiseront toutes les croyances
au contact de leur grande religion et illumineront l'ignorance du temps présent avec la sagesse du passé (75).


L'INDE ET LA GRANDE-BRETAGNE


La prochaine étape du plan comporte l'établissement d'un Commonwealth libre des nations dans lequel l'Inde jouera un rôle égal à celui des autres nations. C'est pour cela que les Anglais sont venus ici et c'est pour cela que d'autres ont dû partir. Et la seule nation dont les institutions soient libres est l'Angleterre dans son ile ; elle a été choisie pour venir ici et pour fusionner avec la nation indienne pour la construction d'un Empire mondial, qui sera en réalité un Commonwealth mondial ; car il ne s'agira pas d'un empire mondial qui gouvernera par la force, mais d'une fédération mondiale qui gouvernera par l'amour et [88] dans la paix. Tel est l'idéal à la réalisation duquel certains d'entre nous travaillent, à la réalisation duquel travaille le Manou. Et il demande la collaboration des ainés de ses enfants ici pour unir l'Orient et l'Occident, non pour eux-mêmes mais pour le bien futur du monde. Il ne s'agit pas de leur faire perdre, leurs caractéristiques propres, mais d'amener entre eux une fusion harmonieuse dans l'intérêt des générations futures qui jouiront des idéaux spirituels élevés de l'Inde et des grands progrès matériels et scientifiques de la Grande-Bretagne. Il faut que ces deux nations soient le modèle futur Commonwealth mondial (26).
Nous, Théosophes, qui avons appris à considérer l'Histoire comme le déroulement d'un plan prévu dans lequel chaque race et chaque sous-race, chaque nation, joue son rôle propre, nous ne pouvons considérer, avec un intérêt intense, les évènements au fur et à mesure qu'ils se produisent, que comme des fragments de la grande mosaïque. Ce plan a prévu, ainsi qu'il a souvent été dit, le rapprochement de l'Inde et de la Grande-Bretagne dans le but de venir en aide au reste du monde. Et ceci en partie pour que le trésor inestimable de connaissances spirituelles que possède l'Inde puisse circuler dans le monde entier par le canal du langage le plus répandu à notre époque, atteignant ainsi les nations plus jeunes, viriles mais encore dépourvues de spiritualisme, surgies du vigoureux stock britannique ; en partie aussi pour que les Indiens, qui ont gravement péché par leurs dissensions puissent être rapprochés par un gouvernement étranger les préparant ainsi à former une nation unie ; en partie pour que la littérature de la liberté qui ne s'est jamais aussi splendidement exprimée, avec une passion sauvage, que dans la langue de Milton, de Burke et de Shelley, puisse réveiller l'Inde du sommeil dans
lequel sont [89] plongées ses traditions de liberté intellectuelle, source de toutes les autres formes de liberté et pour qu'elle puisse engager cette force puissante dans des canaux modernes pour irriguer les vastes étendues de la vie indienne. L'union de l'Inde et de la Grande-Bretagne, manifestée au début par des rapports de dirigeant a dirigé mais qui les mettra plus tard sur le pied d'associés égaux dans l'Empire mondial, devrait préparer l'Humanité à la venue de l'Instructeur universel et devrait poser les fondations d'une nouvelle civilisation (76).
Les Anglais ont encore beaucoup de choses à enseigner aux Indiens ; les Indiens aussi ont beaucoup de choses à enseigner aux Anglais. De l'Inde viendront la spiritualisation de toutes les religions, et les pensées les plus profondes sur la Déité, les conceptions les plus philosophiques sur la solidarité de l'espèce humaine, la science psychologique la plus profonde ; c'est elle aussi qui sauvera le monde du cauchemar de l'industrialisme et élèvera la vie humaine sur un plan plus noble et plus digne. D'Angleterre viendront les sciences pratiques qui mettent les forces de la nature au service de l'homme, l'énergie et la précision qui font du commerce un art, le pouvoir impérial de l'organisation et le génie de mettre les principes en pratique. Que ces deux nations s'unissent pour la rédemption du monde plutôt que de se détruire et de favoriser ainsi la désagrégation du monde. C'est en l'union de ces deux nations que réside l'espoir de l'avenir et ceux qui voudraient les séparer sont des ennemis de l'Humanité (77).
Si nous demandons la liberté pour l'Inde, ce n'est pas pour le seul bénéfice de l'Inde mais aussi pour celui du monde entier. En effet, l'Inde a un idéal tout différent de celui de l'Occident et pour que puisse [90] être fermé le cercle de la perfection humaine il faut que l'Orient puisse réaliser son propre idéal (78).
Elle (l'Inde) s'est passée de l'Angleterre pendant des millénaires et elle a été florissante ; elle pourrait se passer de l'Angleterre pendant des millénaires à venir. Mais ces deux nations ont besoin l'une de l'autre et seront bénéfiques l'une pour l'autre dans un proche avenir. L'Inde désire être liée à l'Angleterre dans ce proche avenir, mais sur un pied d'égalité parfaite et sur aucun autre (79).
Je ne suis pas de ceux qui désirent que le lien unissant l'Inde et l'Angleterre soit rompu. Je désire le voir se prolonger, autant pour le bénéfice de l'Angleterre que pour celui de l'Inde. Je crois en effet que la meilleure chose pour ces deux nations est d'avancer la main dans la main.
Je veux dire par là qu'elles doivent aller de l'avant en égales et non dans les rapports de gouvernant à gouverné. Je veux dire aussi qu'un Indien dans l'Inde doit posséder tout ce que possède, en Angleterre, un Anglais : la fierté de sa race et de son pays, l'amour de son pays ; son patriotisme ne doit pas porter l'étiquette de "sédition" et son désir de liberté ne doit pas être traduit par le mot "rébellion". C'est là un état de choses intolérable qu'il est du devoir de chaque homme d'essayer de modifier (28).


LE PLAN DU MANOU


Le plan du Manou était de constituer avec la mère-patrie, l'Inde, d'une part et avec le peuple anglais dans son ile, d'autre part, le grand Empire de la cinquième sous-race. Les autres sous-races ont eu leur ère de prédominance et le temps est maintenant venu [91] de celle de la cinquième sous-race. Afin que la puissance de cette cinquième sous-race puisse se réaliser sans dommages, l'autocratie a été détruite par la récente guerre en Europe, qui se fût terminée beaucoup plus tôt si, en détruisant l'autocratie en Europe, la Grande-Bretagne en avait appris la leçon et l'avait aussi détruite dans l'Inde. Elle n'a, malheureusement, appris qu'une partie de cette leçon et elle a ainsi retardé sa victoire. Un climat agité et troublé continue à régner en Europe et cela non plus ne pourra prendre fin aussi longtemps que l'Inde n'occupera pas la place qui est la sienne (26).
C'est au XIXe siècle qu'est venu le temps d'une "compréhension mutuelle plus sympathique entre l'Orient et l'Occident", entre les tranches ainée et cadette de la famille aryenne et c'est pour cela que la Société théosophique a été fondée. Elle a été envoyée pour apporter à l'Occident la connaissance spirituelle de l'Orient qui était oubliée, pour conduire l'Occident à se désaltérer aux puits aryens depuis longtemps fermés. Elle a été envoyée pour rappeler à la mémoire de l'Orient le souvenir de ses propres trésors, pour y faire revivre les idéaux aryens, pour lui apporter les trésors accumulés de l'enseignement occidental, pour réunir ses éléments discordants en une seule nation et, surtout, pour faire fusionner les enfants ainés et cadets de la race aryenne : les Indiens et les Anglais. C'est de cette union étroite, fraternelle et indissoluble que dépend l'Empire futur. Et ceci est inévitable. Ceux qui s'y opposeront seront éliminés car la volonté du Père doit être accomplie. Les rebelles, les haineux, ceux qui incitent à la désunion seront éparpillées parmi d'autres nations, des nations arriérées dans leur évolution où leurs déplaisants défauts seront moins nuisibles. Lorsque l'union sera un fait [92] accompli, lorsque le terrain sera prêt, c'est alors que Vaivasvata Manou nous enverra les intelligences instructives de l'Humanité pour élever le peuple composé des meilleurs éléments de Sa race à des hauteurs de gloire éblouissantes et c'est alors que le grand Empire aryen sera révélé (80).
Pour le bien de l'Inde et de l'honneur britannique, au nom de la pitié humaine et de la Justice divine, j'en appelle à tous les hommes et à toutes les femmes de bien dans ces deux pays pour qu'ils joignent leurs mains et leurs coeurs en un effort décidé pour sauver la Grande-Bretagne de la honte et l'Inde d'une mort rapide. Le sort de l'Humanité se jouera en grande partie au cours des années prochaines car, de deux choses l'une : ou bien l'Inde et l'Angleterre, liées par l'Amour et la Justice entreront ensemble dans la nouvelle ère, en paix et avec un égal honneur, ou bien ta grande guerre entre les races blanche et de couleur se déchainera – une guerre à mort qui plongera le monde dans la désolation – et fera s'écrouler à nouveau la civilisation dont les ruines couvriront la terre, jusqu'à ce qu'une race plus forte et plus noble apparaisse qui prendra notre place et bâtira un monde rénové (55).