UNION

LES ENSEIGNEMENTS DES MAITRES DE LA HIERARCHIE

L'AVENIR IMMINENT Par Annie BESANT - 1911

VI — LA NAISSANCE D'UNE RELIGION MONDIALE

VI — LA NAISSANCE D'UNE RELIGION MONDIALE

 


Conférence donnée à la Spring Assembly de la Ligue du Liberal Christianity dans le Free Trade Hall, à Manchester, le mardi soir 23 mai 1911.
Je désire vous parler ce soir d'abord de l'immense différence qui existe entre le monde de la pensée actuel et celui des temps anciens en ce qui a trait à la religion ; puis poser la question suivante : le degré supérieur à franchir constituera-t-il une synthèse, un tout, ou bien sera-t-il une atténuation des différences, plutôt qu'une unité dans la diversité ; et voir ensuite si nous pouvons trouver un fil conducteur nous mettant sur la voie d'un plan que le monde a suivi inconsciemment, dans ses religions et dans ses civilisations, plan que l'homme n'a pas conçu mais à l'exécution duquel il [169] participe sans le savoir, comme un temple s'érige grâce au concours du constructeur, du peintre et du sculpteur. De même que nous savons que ce travail gigantesque s'effectue au moyen d'une multitude d'ouvriers, selon le plan dressé par l'architecte qui indique, une par une, les différentes parties de l'édifice à exécuter, de même derrière la multitude des ouvriers de l'humanité, derrière les Nations, qu'elles soient en progrès ou en décadence, derrière ces Nations qui construisent le grand temple de l'humanité divine, se tient le grand Architecte de l'Univers dont le plan doit être réalisé par la multitude des travailleurs qui constituent l'humanité.
* * *
Or, y a-t-il aujourd'hui, des signes indiquant qu'un rapprochement possible puisse se faire entre les nombreuses religions du monde ? Au sein du chaos de controverses et de chocs provoqués par l'attitude agressive des différents crédos, pouvons-nous entrevoir la possibilité d'une unité qui changera l'état de guerre en un état de paix et qui réunira les fragments pour en faire un tout splendide ? [170]
Reportons-nous de deux mille ans en arrière. Nous constatons que sur toute la surface du globe, partout où une religion était constituée, celle-ci était essentiellement nationale. L'Indou de ce temps-là professait la religion indoue ; le Perse, la religion de Zoroastre ; le Grec, le Romain, l'Égyptien, et maintes nations plus anciennes encore, tous professaient chacun leur
religion, et celle-ci était une religion nationale ; alors nous voyons les religions vivre assez paisiblement côte à côte, en revanche, un homme qui abjurait sa religion nationale était considéré plutôt comme traitre à l'État que comme hérétique à sa foi ; ce fait peut être constaté maintes et maintes fois en consultant l'histoire du passé. Celle-ci ne montre aucun exemple qu'une nation ait voulu convertir à sa religion, les nations voisines appartenant à une religion différente. Les nombreuses religions du monde se tenaient côte à côte, travaillant chacune de leur côté, la nation et la religion ne formant qu'un tout indissoluble.
Ce n'est pas sans intérêt (pour l'instant je fais une digression en faisant de l'histoire rétrospective) de constater que les théories de l'église anglicane sont aujourd'hui identiques à celles de la pensée antique. En théorie, cette [171] Église est une Église nationale ; quiconque est né parmi le peuple anglais, est né, en théorie dans cette Église nationale ; l'État et la nation sont considérés comme étant proches voisins l'un de l'autre. Je dis en théorie, car vous savez combien la pratique est différente, dans ce pays ; mais, dans ces temps reculés, la théorie et la pratique marchaient de pair, et ce n'est que de temps à autre, comme chez les Hébreux, par exemple, que les peuples s'efforçaient de faire quelques prosélytes parmi les nations voisines. À un point de vue général donc, les religions avaient un caractère national, la politique ; les institutions sociales de la nation étaient réellement érigées par la religion qui leur servait de base fondamentale.
Prenons l'Inde dont la religion est la plus ancienne de toutes les religions vivantes et qui se perd dans la nuit des temps. On y constate que la politique indoue est identique à telle du peuple indou. Il était d'usage chez les Indous que, pourvu que l'autorité des Écritures sacrées, les quatre Vedas, fût admise, l'ordre social fût observé, l'intellect pouvait garder son indépendance. Dans les limites de ce grand cercle que formait la religion indoue, on pouvait voir se constituer différentes écoles [172] de pensée, mais à la condition que toutes eussent le respect du Veda, bien qu'elles pussent ensuite suivre leur voie spéciale, pourvu qu'elles se soumissent à la politique sociale sans s'écarter de l'ordre établi ; l'intellect gardait toute liberté en matière de religion, et dans le vaste sein de la religion indoue, tout système de philosophie était admis à fleurir, foutes les écoles de la pensée étaient reconnues comme faisant partie de la religion.
Si l'on jette un regard sur les autres religions, nous pouvons voir que le même fait s'y présente dans une certaine mesure. En se reportant au temps où la Rome impériale envoyait ses aigles planer sur ce qu'on appelait alors
le monde civilisé, on verra que ces aigles déployèrent leurs ailes sur des religions multiples. Et quand la persécution commença à sévir contre le Christianisme, c'était moins contre une religion nouvelle que Rome leva l'épée que contre ceux qui ne voulaient pas se prosterner devant l'Empereur et lui rendre les hommages divins comme chef de l'État. En frappant le Chrétien, Rome visait plutôt le traitre au gouvernement impérial que l'hérétique. Ce fut la prétention des Chrétiens à vouloir que le Christianisme fit la seule religion vraie, leur [173] refus de ranger l'Empereur parmi les dieux, qui souleva dans Rome la persécution contre les Chrétiens, ceux-ci étant considérés comme un danger pour le gouvernement impérial.
Le même fait est vrai pour toutes les autres nations de l'antiquité. Mais si nous voulons maintenant considérer ces religions, non plus comme partie inhérente de leurs nations, mais plutôt dans leur essence même, que voyons-nous émerger graduellement du sein même de cette masse d'opinions, de ce vaste fatras de croyances diverses ? On en voit surgir certaines doctrines qui sont communes à toutes. Les découvertes faites dans les annales du passé par les historiens et les archéologues, les études des religions anciennes, et la littérature laissée par ces savants, ont eu comme résultat, dans nos temps modernes, l'éclosion d'un consensus établi par l'élite, intellectuelle et d'après lequel il y a des doctrines principales communes à toutes les grandes religions surgissant de temps à autre dans l'histoire du passé, ce qui suggère ainsi l'idée que toutes ont une origine commune. Ce n'est cependant pas sur ce point que je désire pour l'instant attirer votre attention, et j'en arrive à un antre fait qui n'a pas été reconnu aussi généralement [174] à savoir que si l'on admet que chaque religion contient un petit nombre d'enseignements d'un caractère universel, chacune d'elles est aussi influencée par un esprit qui lui est propre. Ceci ressort très fortement de l'étude des religions du monde, et c'est là l'une des caractéristiques du plan dont j'ai parlé. Car chaque religion a sa note propre, sa caractéristique spéciale, et leur ensemble ne fait pas entendre un seul son, mais un splendide accord, quand tous ces sons sont entendus ensemble. Prenons les religions de l'Inde et laissez-moi vous raconter un fait qui ne vient pas de moi mais d'un missionnaire chrétien qui vécut, je crois, une quarantaine d'années dans l'Inde et qui connaissait à fond la religion du pays et l'esprit du peuple, le Dr Miller, le Presbytérien bien connu qui fonda à Madras le Collège chrétien. Alors qu'il s'était retiré, écrivant il y a quelque trois ans, aux Indous qui avaient été pendant tant d'années ses élèves dans le collège qu'il avait fondé et fait construire, il employait cette phrase remarquable : "Souvenez-vous, disait-il, de ce que la religion indoue a donné au monde : elle lui a fait connaitre l'immanence de
Dieu et la solidarité entre les hommes." Ce sont là deux aspects réels d'une grande vérité. Admettre [175] que la vie universelle est dans tout ce qui nous entoure, et que la fraternité humaine n'est que la face terrestre de la grande réalité spirituelle, tels sont les deux principes qui doivent ne jamais être séparés ; et cela, ajoute le Dr Miller, est la note principale de la religion indoue.
Si nous passons maintenant à la religion de Zoroastre, et que nous cherchions quelle est la part spéciale qu'elle apporte à la pensée du monde, nous trouverons qu'elle fait entendre la note de la pureté. De bonnes pensées, de bonnes actions, de bonnes paroles, telle est la triple déclaration que font chaque jour tons les Parsis dans leurs dévotions journalières. Pureté d'esprit, pureté de coeur, pureté d'action ; telle est leur caractéristique spéciale, pureté s'étendant à toutes les parties constitutives de notre vie. La terre, l'eau, le feu, ne doivent pas être souillés, c'est-à-dire que les éléments doivent être gardés purs, autrement la vie physique de l'homme serait souillée inévitablement, et l'on sait trop combien cette note est nécessaire à la vie moderne plongée qu'elle est dans la fange. Pas un Zoroastrien ne voudrait souiller un ruisseau, et s'il était donné aux adhérents du grand prophète perse de vivre ici, les cours d'eau qui traversent Manchester [176] couleraient aussi purs et aussi clairs que lorsque la ville n'était qu'un simple village. La note caractéristique des Zoroastriens fut donc que l'homme doit vivre une vie pure au sein d'un entourage pur.
Arrivant maintenant à l'Égypte, quelle est la note qui fut frappée dans la vie religieuse de cette contrée ? Ce fut celle de la science, l'étude de l'homme et du monde qui l'entoure ; trouver dans les mondes supérieurs les réalités dont nous n'avons ici-bas que l'ombre. Ce fut l'Égypte qui étudia la science de la chimie, et le nom même de celle-ci dérive de la terre de Chem, cette terre où fleurit la science du passé, tant son nom est attaché au sujet favori de ses investigations.
Passant de l'Égypte en Grèce et bien que l'espace qui sépare ces deux pays soit physiquement très petit, nous pouvons voir combien grande est la différence qui les divise au point de vue intellectuel, car là où l'Égypte parle de science, la Grèce, elle, parle de beauté, travaillant à mettre le beau dans la vie de son peuple comme aucune nation ne l'a jamais fait et ne le fera jamais. Telle est la leçon qu'elle donna à sa population tout entière. La beauté, chez les Grecs, ne résidait pas dans des oeuvres [177] d'art, tableaux ou statues renfermés dans des galeries closes. Non, la beauté de la Grèce se montrait dans l'architecture, dans des statues offertes aux yeux de la masse,
et elle comprenait, comme ne l'a pas encore fait l'Angleterre, que le Beau ne doit pas être le luxe de quelques-uns, mais le pain de vie de l'humanité tout entière.
De même que la Grèce parla de beauté, Rome, elle, parla de législation, de grandeur de l'État, de puissance du peuple, celui-ci étant considéré comme faisant corps avec son gouvernement et ses représentants. Rome ne se préoccupait que fort peu de l'individu, elle ne voyait que la nation ; son idéal, était l'État, et le citoyen obéissait à la loi, la liberté réelle d'une nation ne pouvant exister que là où la loi est toute-puissante.
Puis, laissant Rome et la Grèce que l'on peut considérer comme les ancêtres de la civilisation moderne, nous voyons naitre dans l'Inde une autre religion, celle du seigneur Bouddha, et la note frappée par celle-ci est celle de la connaissance. Revenant de nouveau vers l'Occident, nous trouvons les Hébreux dont la religion donne la note de la justice, celle du Seigneur Juste qui aime la justice dans la loi ; et [178] c'est dans le sein de ce sentiment de justice que naquit la dernière religion ; celle du Christ. Quelle est la note suivante spéciale que donna le Christianisme au monde ? D'abord, la valeur de l'individu que les nations anciennes du monde n'avaient pas reconnue dans toute son étendue. Pour celles-ci, la civilisation était basée sur la famille. La famille était l'unité, et non pas l'individu. Ce fut le Christianisme qui frappa la note de l'individualisme, et ce fut afin que ce principe fût complètement et profondément développé que quelques-unes des premières doctrines furent pour un certain temps étouffées dans la Chrétienté. La grande doctrine de la RÉINCARNATION enseignée dans l'Église primitive et apparaissant de nouveau de nos jours, fut délaissée pendant mille ans environ par la pensée chrétienne, et ce fut sage et bon, comme le sont toutes choses, lorsqu'on les considère à leurs justes proportions et à leur vraie perspective, car il était nécessaire d'édifier l'individu. Et l'idée d'une seule vie éveilla chez l'individu une activité qu'il n'aurait pas eue, s'il avait cru que de nombreuses vies s'étendaient devant et derrière lui, et l'obligation de faire des efforts donna naissance à l'idée que l'individualité est nécessaire pour progresser. Oh ! Je sens bien [179] qu'en regardant autour de vous, vous constatez les maux causés par l'individualisme ; mais regardez plus loin et vous verrez aussi le bien qui en découle. De même qu'on ne peut bâtir une maison sans briques, de même on ne peut construire une communauté internationale que lorsque les individus sont développés et devenus forts et puissants.
Mais une autre note fut frappée par le Christianisme, note dominante qui tout d'abord ne fut guère prise en considération, mais elle commence maintenant à se faire entendre clairement. Car, alors que l'idée d'une seule vie, d'un ciel et d'un enfer éternels stimulait presque jusqu'à la folie la valeur de l'âme individuelle, il y avait quelque chose d'autre que la doctrine ; il y avait l'exemple du fondateur, et cet exemple faisait résonner la note de l'esprit de sacrifice, qui, en temps voulu, deviendra la note dominante des nations chrétiennes. Car s'il est vrai, comme la chose est réelle, que le Christianisme a élevé l'individu à un rang plus haut que celui qu'il occupait auparavant, il est vrai aussi que la force implique le devoir d'abnégation ; et l'exemple magique donné par le Christ contribua grandement à entrainer graduellement les esprits les plus nobles vers le désir de [180] pratiquer, eux aussi, l'esprit de sacrifice qui leur était présenté. C'est pourquoi nous voyons aujourd'hui, dans le Christianisme, si imparfait qu'il soit, un altruisme plus grand que dans toute autre nation du monde. Je parle ici de choses que je connais, ayant voyagé dans bien des pays, et c'est bien souvent que j'ai dit à mes amis indous : "L'absence de solidarité qui vous caractérise, votre manque de patriotisme, votre apathie en face de l'injustice sont autant de choses dans lesquelles le Christianisme est bien en avance sur vous. Tandis que sur de nombreux points concernant la vie spirituelle, l'Inde est plus avancée que l'Angleterre en tant qu'il s'agit de devoir public, c'est-à-dire le devoir de l'homme à lutter contre le mal, à protéger le faible et à se sacrifier aux malheureux ; en Angleterre, on commence à faire de grands progrès et à démontrer quels puissance est synonyme de devoir et non d'oppression."
Or, ayant esquissé rapidement les religions du monde, quel sera le résultat de cette brève étude ? Chaque religion fait entendre une note différente ; chacune incarne une vie propre, un amour particulier, le mode d'expression diffère et la différence qui existe est un gain plutôt qu'une perte. Aucune de ces notes ne doit être [181] négligée, aucune de ces tonalités dominantes que font résonner les différentes religions ne sera oubliée dans la religion mondiale qui se prépare. À l'Inde, il faut prendre ses doctrines de l'immanence de Dieu et de la solidarité entre les hommes ; à la Perse, son enseignement sur la pureté ; à l'Égypte, la science qui n'est pas en opposition à la religion mais en fait plutôt partie intégrante ; à la Grèce, le sentiment de la beauté ; à Rome, sa connaissance de la loi ; au peuple hébreu, son sentiment de justice ; au Christianisme, l'esprit de sacrifice.
De tous ces joyaux appartenant en propre à chaque religion du monde, lequel pourrez-vous exclure quand naitra la religion mondiale. En fait toutes les différences dues aux différences d'esprit, de tempérament, nous apprennent une vérité primordiale : que les vérités spirituelles ne peuvent être transmises dans leur perfection par l'intellect ; seul l'esprit dans l'homme est susceptible de saisir les vérités spirituelles. L'intellect s'empare des phénomènes et raisonne sur eux pour on faire des principes ; l'esprit a l'intuition de l'esprit, et sait qu'il est un avec tous ; et toutes vos religions, – toutes les religions du monde, – sont les représentations de la grande vérité spirituelle [182] une. L'intellect est comme le prisme qui décompose la lumière du soleil en ses différentes parties constitutives ; toutes les couleurs sont dans la lumière blanche, mais ne sont visibles que lorsqu'elles passent à travers un prisme ; toute la beauté du monde provient des différences, toutes les couleurs du monde dérivent de la blancheur du soleil. Ce n'est pas dans le soleil que résident les différences existant dans la constitution de objets divers présentant des couleurs et qui font la beauté du monde. Le bleu de la mer, le vert des prairies, les diverses couleurs des fleurs, toutes ces teintes exquises qui ravissent vos yeux par leur charme, toutes ces couleurs émanent de la seule lumière blanche, une partie de cette lumière servant d'aliment, et le reste produisant la beauté.
… La Nature est toute de couleurs variées, bien que la lumière soit blanches ainsi en est-il avec le soleil spirituel. Un soleil de vérité brille pour toutes les religions qui ont guidé et consolé l'humanité, mais chacune d'elles a pris ce qui lui convenait, rejetant le reste ; et il en est des religions comme de l'arc-en-ciel qui fait la voute céleste plus magnifiquement belle, parce que chaque goutte d'eau suspendue dans l'air reflète différemment la lumière et non [183] uniformément. C'est pourquoi toutes les religions sont utiles car elles reflètent différemment la lumière ; toutes font la gloire et la splendeur de la religion mondiale diversement colorée, issue de la diversité des croyances qu'elle synthétise toutes.
C'est là le premier point que je désire éclaircir tout particulièrement.
Il ne faut pas confondre Unité et Uniformité. La vie est une, mais la splendeur du monde dépend de la diversité des formes. Quoi ? Qu'est-ce que l'évolution ? Le protoplasme devenant minéral et végétal, animal et homme ; mais plus est grande la différence entre eux, plus est grande la vie divine qui les anime tous. Cette vie est si complète, si riche, qu'elle ne peut s'incorporer dans une seule et unique forme ; il n'y a que l'univers tout entier qui puisse refléter l'image divine. C'est donc dans la multiplicité des formes et non dans
l'uniformité que git la richesse et la beauté de la religion, comme de tout ce qui existe, par ailleurs, dans le monde, et je pense que la religion mondiale ne rejettera aucune de ces différences mais qu'elle les rassemblera pour constituer un tout. Il n'y a sans doute pas grande puissance dans les notes que [184] vous égrenez une par une au piano en jouant des gammes, mais si ces mêmes notes sont frappées ensemble, choisies et accordées entre elles avec la magie d'un Beethoven ou d'un Wagner, une puissante harmonie s'en dégage ; plus ces accords sont nourris, plus ils sont changeants, sonores et complets, plus splendide est celte harmonie issue de la magie du maitre qui a su, de plusieurs notes différentes, constituer un ensemble.
Quand la religion mondiale naitra, elle ne sera pas telle ou telle religion ; elle sera un immense accord, une majestueuse harmonie se dégageant de l'humanité ; chaque note sera parfaite, mais de l'accord complet de ces notes parfaites dépendra la splendeur et la puissance de l'ensemble.
Considérons maintenant quelles sont les conditions qui rendront possible la naissance d'une semblable religion. Il est clair que la chose était impossible il y a deux cents ans. Toutes les diverses religions se renfermaient dans leurs coques protectrices respectives, chacune d'elles ignorant tout des voisines. Que connaissait le Christianisme des grandes croyances de l'Orient, il y a deux cents ans ? Bien des choses ont apporté à cet égard plus d'une transformation. [185] Ce furent tout d'abord les progrès de la science, grâce auxquels les moyens de communication devinrent plus rapides et plus tacites. Lorsqu'il fallait des mois pour faire la moitié du tour du monde, l'homme, quand il partait, s'installait dans tel ou tel pays, y faisait sa résidence, y vivait et y mourait. Du jour où les moyens de communication deviennent plus fréquents et plus pratiques, dès lors que vous pouvez aller de Londres à Bombay en moins de quatorze jours, temps que j'ai mis à faire ce voyage il y a quelques semaines, dès lors que vous voyez ces moyens de transport devenir de plus en plus rapides, les hommes appartenant à des Fois différentes viennent en contact les uns avec les autres, se coudoient et se communiquent leurs pensées mutuelles.
Lorsque j'étais enfant, on éditait encore de ces cartes de missionnaires où les nations du monde étaient peintes selon leurs couleurs religieuses respectives. Un beau jaune, symbole de la lumière, indiquait tous les pays chrétiens ; le reste était peint en noir, symbole de l'obscurantisme. On appelait cette partie noire : l'empire du paganisme ; les parties brillantes s'appelaient : Christianisme et l'esprit de l'enfant était quelque peu attristé et déprimé à la [186] vue de tout ce noir qui s'étendait partout dans le monde,
en une bien plus grande proportion que le Christianisme. Les chrétiens pensaient alors que leur foi était unique, qu'elle était l'unique révélation. Mais, il n'y a pas si longtemps, un archevêque de Cantorbéry en s'adressant, dans Eseter Hall, à une foule de missionnaires rassemblés avant leur départ pour les Indes, recommanda à ces derniers de ne pas oublier qu'ils allaient dans une nation ayant ses propres Écritures, sa philosophie, sa croyance, et qu'ils n'avaient pas à oublier que toutes les Écritures sont inspirées de Dieu, bien qu'il jugeât les siennes comme étant les plus inspirées de toutes. Mais lorsqu'un archevêque peut s'exprimer de la sorte, quand, en envoyant des missionnaires, il les prie de se rappeler, – ainsi que le dit saint Paul, il y a quelques siècles, – que Dieu s'exprima de bien des façons différentes, dans le passé, par l'intermédiaire des prophètes, lorsqu'on en vient à reconnaitre que ces prophètes ne sont pas l'apanage d'une nation, mais qu'ils sont de toutes les nations ; lorsqu'on en vient à comprendre que les Écritures appartiennent à toutes les religions et non à une seule ; lorsqu'on en vient à admettre que, dans le royaume divin, il n'y a [187] ni hérétiques ni damnés mais que, dans cette grande famille humaine, tous font partie de la maison du père, ah ! Dès l'instant où ces sentiments s'élèvent du mur des hommes, – et ils s'expriment déjà aujourd'hui parmi les fleurs de l'humanité dans toutes les nations, alors un pareil état de choses rend possible, plus que jamais, la religion mondiale. Et l'on comprend que, peut-être, s'étendra ce sentiment exprimé dans l'une des antiques Écritures de l'Inde où il est dit que par Shri Krishna Dieu parla, où il est dit encore que Ski Krishna déclara : "L'homme vient ! Moi, par de nombreuses voies, quelle que soit la voie par laquelle il s'approche de Moi, je l'accueille car toutes les voies sont Miennes." C'est là une grande vérité. Dieu est le centre, les religions sont toutes sur la circonférence et, de même que tous les rayons aboutissent au centre, toutes les religions conduisent à Dieu.
Ce qu'il convient, ce n'est pas de nous convertir les uns les autres, ce qu'il faut avant tout c'est approfondir et spiritualiser la religion à laquelle chacun de nous appartient pour en trouver, par soi-même, la valeur. Comme cet état d'esprit se généralise, comme les hommes en arrivent à admettre qu'ils ont tous à [188] apprendre les uns des autres, que tous ont quelque chose de bien à enseigner, comme cette attitude mentale est maintenant commune à toutes les nations civilisées du monde, la naissance de la religion mondiale est désormais possible.
Autre chose encore vient aujourd'hui nous assurer de cette possibilité. J'ai parlé tout à l'heure des recherches archéologiques, des travaux des étudiants, de l'étude que l'on entreprend partout des choses de l'Orient comme de celles de l'Occident. De toutes ces recherches et de ces études se dégage la vérité que j'ai mentionnée, à savoir : qu'il y a certaines grandes doctrines tenues pour exactes partout et en tous temps par tous les peuples et que nous retrouvons dans toutes les religions du monde. C'est là le vrai Catholicisme. Enseignements admis depuis toujours, enseignements professés partout, enseignements crus par tous. Et pourquoi est-ce là le vrai catholicisme ? Parce que c'est un témoignage de l'universelle conscience religieuse envers ce principe : l'union de l'Homme avec le Divin.
Vous n'ignorez pas que, au siècle dernier, alors que la science paraissait édifier un rempart de matérialisme inattaquable, le professeur Huxley, et beaucoup d'autres avec lui, se [189] baptisèrent du nom d' "agnostiques", terme qui résumait la position intellectuelle choisie par eux. Ce mot était significatif. Littéralement traduit, il est naturellement absurde, car il signifie : "sans connaissance".
Il fut adopté par les hommes de science, qui n'étaient certainement pas des ignorants, et nous savons tous ce que signifie réellement : "Agnostique" : "sans la Gnose" et la Gnose n'était pas la connaissance en général, mais une connaissance particulière. Le professeur Huxley déclare que l'homme possède deux moyens de connaissance : celui offert par les sens à l'aide desquels l'homme observe les phénomènes, et la raison à l'aide de laquelle il considère le phénomène et en tire des conclusions. Telles sont, disait-il, les deux méthodes de connaissance pour l'homme, les seules qu'il concédait à tout individu : d'une part, les sens, pour observer ; d'autre part, la raison pour comprendre. Mais la Gnose, – tout ce qui ne peut être connu par les sens, – ne s'obtient pas par l'intellect ; c'est la connaissance de l'esprit par l'esprit et cela, a-t-on dit, c'est Inconnaissable.
Regardez-vous maintenant vous-mêmes, ou embrassez d'un regard l'histoire de l'humanité [190] dans son ensemble. Certes, vous avez un corps et des sens, des sentiments et une raison ; n'avez-vous rien de plus ? De votre réponse à cette interrogation dépend l'avenir de la religion. Toutes les Écritures sont unanimes sur ce point : que les sens ne peuvent voir, ni la raison comprendre l'esprit qui est la vie, vie universelle et éternelle. Ne trouvez-vous rien en vous qui soit supérieur aux sens et à la raison ? N'avez-vous, à aucun moment de votre vie, senti quelque chose de plus, en vous, que cela ? L'histoire nous dit que ce que l'on appelle l'Instinct religieux est,
de tous les témoignages de la conscience humaine, le plus répandu, le plus persistant. C'est là un point auquel il nous faut songer lorsque vous envisagez l'agnosticisme. Vos sens peuvent vous tromper ; ne vous font-ils pas croire que le soleil se lève ou se couche alors qu'il ne se produit rien de semblable ? N'arrive-t-il pas aussi parfois que votre raison vous induise en erreur, car elle manque souvent de base pour un travail déterminé, et ses conclusions dépendent de la nature même des bases sur lesquelles elle édifie ces conclusions. Des grands intellects comme des moindres, des nations de toutes les espèces, s'est élevée cette conscience religieuse qui [191] se montre aujourd'hui encore. Allez-vous admettre les témoignages de la conscience partout ailleurs et les méconnaitre, les refuser pour ce point particulier ? Pouvez-vous ignorer ce témoignage universel des âges passés persistant jusqu'à nos jours ? C'est de cela, c'est de cet universel et antique témoignage que jaillit la religion, car la religion n'est autre que la recherche de Dieu par l'homme ; telle est sa véritable définition. Et ce qu'il y a en cela d'intéressant, c'est qu'à mesure que vous vous élevez au-dessus des sens et de la raison, vous vous élevez aussi au dessus des différences ; en effet, les témoignages de tous les mystiques, dans leur expérience religieuse, se ressemblent. Le Yogi Indou, le saint catholique Romain, le dévot Protestant, tons ont les mêmes expériences et s'expriment de la même façon. Ils diffèrent dans les cérémonies, croyances, choses extérieures, mais dans la région de l'Esprit, ils ne parlent qu'une seule et même langue et ce ne sont plus, là, ces tours de Babel des foules ici-bas. Si vous êtes enclins à rejeter ces considérations, vous vous trouverez alors on présence d'une autre difficulté : les hommes que l'humanité révère, les hommes que l'humanité considère le plus, sont précisément les [192] hommes dont la conscience religieuse s'est manifeste le plus clairement, de la façon la plus décisive.
Les conquérants apparaissent et disparaissent, les rois règnent et périssent, les hommes d'État viennent et s'en vont, mais les génies de la religion demeurent, de génération en génération, d'âge en âge, conservant les hommages et la vénération de l'Humanité.
Quel conquérant du passé ou du présent, quel puissant roi, quel génie, quel homme d'État, qui donc placerez-vous en parallèle avec le Bouddha et le Christ ? Qui donc opposerez-vous comme modèles, comme exemples, comme spécimens d'une parfaite et suprême humanité ? Leur couronne est immortelle, elle ne se flétrit jamais ; leur royaume est durable car il ne connait pas la chute. Des millions et des millions d'hommes, dans toutes les générations, rendent hommage à la grandeur de ces deux Êtres. Je ne soulève
pas à leur sujet de questions religieuses, je ne demande pas s'ils furent, ou non, plus que des hommes mais je déclare que, parmi tous les hommes, que l'Humanité ait jamais produits et dont les noms sont encore célèbres, il n'en est pas un seul qui approche ces deux-là, il n'en est pas un [193] seul auquel des myriades d'âmes adressent autant de vénération profonde et d'amour. Voilà donc encore un témoignage en faveur de la grandeur de l'idée religieuse.
Pour la première fois, il nous est aujourd'hui possible, en considérant le monde, de voir que tous les grands Instructeurs furent animés du même esprit, que les grandes vérités, ainsi que je l'ai dit, furent et sont encore une. Mais une nouvelle question surgit :
Si cela est, comment écarter les différences, là où elles sont causes de controverses ?
En essayant d'élever les hommes du terrain de la spéculation intellectuelle à la conscience spirituelle où tous les hommes sont un.
Telle est la réponse.
La religion mondiale ne peut être dogmatique ; elle doit être ce qu'on appelle : mystique. Que signifient ces deux mots ?
Je ne suis pas de ceux, qui, en étudiant l'histoire religieuse, sont enclins à mépriser et à flétrir le dogme. Je prétends au contraire qu'il est nécessaire à un stade déterminé de l'évolution religieuse, à un stade déterminé dans l'éducation.
Un dogme n'est que la déclaration d'une vérité imposée de l'extérieur à autrui. C'est [194] l'enseignement par l'autorité, autorité d'un livre, d'un homme, ou d'une Église, peu importe ! Cet enseignement vient à l'homme de l'extérieur et exige une foi absolue de la part de celui qui le reçoit. Pareille méthode existe dans le domaine scientifique quand vous commencez à apprendre la science. Lorsque vous pénétrez dans le laboratoire de l'école, vous êtes tenus d'apprendre en vous fiant à des enseignements dogmatiques. Le professeur affirme que telle ou telle chose est une vérité et si l'enfant ne l'admet pas, pour un certain temps du moins, il ne sera susceptible d'aucun progrès dans le cours de ses études. Si, dans le laboratoire, il désire être un libre-penseur, il y a de grandes chances pour qu'il lui survienne des accidents qui le réduiront en miettes ; s'il déclare : "Oh ! Je ne puis rien admettre d'autorité ; je prétends me passer du témoignage de qui que ce soit venant me déclarer qu'une explosion se produira si je combine le chlore à l'azote."
S'il prétend faire ainsi qu'il dit, il s'assurera de la chose par lui-même, mais il recueillera le fruit de son expérience en d'autres mondes que celui-ci.
Il vous faut des dogmes, vous ne pouvez pas même vous en passer durant un laps de temps [195] très court, mais ce que l'étudiant apprend ainsi par le dogme, il l'apprend plus tard par expérience personnelle, et ce n'est qu'alors qu'il sait réellement. Ce que l'on vous apprend ne saurait être pour vous la connaissance ; vous pouvez répéter ce que vous avez entendu, mais ce n'est pas là savoir ; aussi toute méthode d'éducation a-t-elle pour principal objectif de faire passer l'étudiant du stade dogmatique celui où il pourra savoir et connaitre par lui-même avec sa propre raison, sa propre intelligence ; la même chose est vraie en religion, dans l'Enfance de l'Âme. Durant les premières périodes de l'évolution de l'Âme, le dogme est nécessaire pour entrainer cette âme ; les objections faites et tes critiques portées au dogme sont de vulgaires preuves d'ignorance, car ceux qui le critiquent ne tiennent aucun compte dosa vraie signification ni de sa place dans la longue évolution de la conscience humaine. Mais arrive un point où le dogme doit laisser la place à la connaissance par soi-même.
La croyance du mystique, sa connaissance, se résument en ce simple fait qui consiste à accepter une vérité qui lui serait imposée de l'extérieur, il découvre et reconnait en lui une vérité, et il s'oblige en plus à se conformer [196] à cette vérité intérieure. Voilà ce qu'est le mystique.
C'est l'homme qui voit la vérité. La connaissance ! C'est là ce dont vous avez besoin ; et quelle est la condition même de cette connaissance ? Cette condition consiste à pouvoir modifier une partie de vous-mêmes pour être en mesure de répondre aux impacts qui, de l'extérieur, viennent vous frapper. Vous voyez grâce à votre corps éthérique et parce que l'éther qui est dans l'oeil vibre à la lumière, lumière due aux vibrations de l'éther ; vous voyez par la faculté que vous avez en vous de pouvoir reproduire ces vibrations. Et il en est de même pour tous nos sens. Vous ne connaissez du monde extérieur que ce à quoi vous pouvez répondre de l'intérieur de votre être. Ouïe, odorat, gout, vue, toucher, ce sont là autant de modifications de votre corps, lequel a appris à se modifier dans ces différents sens, à répondre aux vibrations qui lui arrivent de l'extérieur. Il y a des millions de modes vibratoires qui vous entourent et vous frappent, dont vous n'avez pas conscience faute de pouvoir les reproduire en vous ; appliquant cette loi qui se répète dans tous les domaines, car le monde est un, appliquant cette loi à des degrés supérieurs, [197] l'homme qui a développé en lui la nature spirituelle peut répondre aux vibrations spirituelles de l'univers parce qu'il
peut les reproduire en lui-même. Tel est le mode de connaissance pour que le Dieu en nous réponde au Dieu qui nous est extérieur ; alors, et alors seulement, vous avez la Gnose, alors seulement vous pouvez savoir que Dieu est. Vous ne pouvez prouver son existence par des raisonnements ; intellectuellement parlant, il ne vous est possible que d'arriver à des probabilités. Vos sens ne peuvent non plus le voir, "ce n'est pas par l'oeil de chair qu'on le connait", dit un verset indou, "mais seul l'esprit en vous qui est une partie de Lui-même, une étincelle du feu éternel, une semence de l'arbre impérissable, connait la source dont il provient : et quand l'esprit s'ouvre, alors seulement, on connait Dieu." Si vous le cherchez en vous plutôt qu'à l'extérieur, si vous descendez dans les profondeurs de votre être au lieu de chercher autour de vous où l'on ne voit de lui que relativement peu, lorsque vous l'aurez trouvé en vous, vous Le verrez alors partout à l'extérieur ; désormais nul ne pourra vous ébranler dans votre foi, car il s'agit dès lors pour vous de connaissance et non de ouï-dire. [198] Tel est le témoignage du mystique ; voilà aussi ce qu'enseignera la religion mondiale ; elle n'imposera aucun dogme extérieur, elle évoquera la réponse de l'être intérieur, elle s'efforcera de développer la nature spirituelle, apprendra que la foi apparait dès l'instant où la vérité est vue. Oh ! Quelle grande folie fut celle des peuples qui, pour propager la religion, tirèrent l'épée en imposant leurs vérités. Pourquoi ? Le seul désir de la vérité est de se manifester à l'esprit de l'homme. Si vous êtes enfermés dans une chambre obscure où aucun rayon de soleil ne pénètre, bien qu'il brille au dehors, vous dirai-je : "Vous serez damnés car vous niez le soleil" ? Ou bien vous dirai-je : "Mon frère ! Sortons ensemble et venez là où le soleil brille" ? La nature de la vérité est telle. Le besoin de la connaitre est en vous, vous avez besoin d'y croire et vous devez la connaitre par vous-même. Lorsque la religion mondiale sera née, tout homme trouvera en lui-même le pouvoir de connaitre et, de ce fait, il connaitra la conscience
Sachant cela, n'essayez donc jamais d'imposer de l'extérieur, et à aucun homme, une croyance qui lui répugne ; dès l'instant où celui-ci aura pu s'élever sur le plan où elle est [199] visible, elle brillera à ses yeux. Nous ne pouvons pas grand-chose à cet égard pour autrui, nous pouvons décrire nos propres expériences, dire ce que nous savons, mais l'homme doit connaitre par lui-même car alors seulement la connaissance est Connaissance. Quand vous aurez atteint ce point, vous saurez que chaque stade a son rôle déterminé et sa beauté propre ; vous ne plaindrez plus les âmes-enfants qui ne trouvent encore que par l'image et le symbole la voie dans laquelle elles pensent pouvoir se rapprocher davantage du Divin : vous comprendrez que
chaque enseignement a sa valeur, chaque religion son oeuvre à remplir, mais qu'une religion, pour être mondiale, doit être plus grande que l'homme, embrasser le monde ; autrement, certains ne pourraient s'y rattacher, alors qu'elle doit nous englober tous.
Mes dernières paroles, amis, vous diront que si vous désirez l'avènement d'une semblable religion mondiale qui, en même temps, sera la base d'une Fraternité universelle comme de la Paix universelle, il vous faut entreprendre votre propre éducation individuelle plutôt que de chercher à exercer vos activités extérieurement à vous-mêmes. À mesure que nous pénétrons en nous, dans notre nature spirituelle, [200] que nous trouvons vérités sur vérités en nous-mêmes et que nous nous apercevons que nous sommes vraiment des Dieux en voie de devenir tendant à une ressemblance de plus en plus parfaite avec, le Divin, oh ! dès l'instant où nous nous rendons compte de cela, nous usons les bases de la religion mondiale et ce que l'on ne peut obtenir par l'argument, par la controverse, par les raisonnements intellectuels, nous l'obtiendrons le jour où notre coeur et notre amour auront velue en nous la nature spirituelle de notre être, car l'amour est au-dessus de l'intellect, il est plus puissant et plus profond que l'intelligence ; l'Amour et le Divin sont si intimement unis que l'homme qui sait aimer ne saurait tarder à aimer Dieu.

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